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They Do Comics - Rick Remender

They Do Comics - Rick Remender

chronique

Dans le monde des comics, les dessinateurs sont souvent plus populaires ou en tous cas plus connus des lecteurs que leurs compères scénaristes. Mais ces derniers temps, la tendance s'inverse, notamment grâce aux efforts des comic books indépendants, menés par le catalogue d'Image Comics, qui conduisent toujours plus de lecteurs à chérir et à suivre leurs auteurs favoris. Et parmi ceux qui comptent, en 2016, on trouve le nom de Rick Remender, qu'on retrouvera dès la semaine prochaine avec une nouvelle série, Seven To Eternity, une fantasy inspirée par Moebius et Jodorowsky (L'Incal), qui nous offre la parfaite occasion de revenir sur celui qui était jadis un animateur, et est aujourd'hui l'un des scénaristes les plus influents de la scène des comic books.

Enfant de Los Angeles, Rick Remender est né le 6 février 1973, et apprendra donc à grandir dans un monde en pleine guerre froide, et à devenir adolescent sous les deux mandats de Ronald Reagan. Une époque qui le marquera profondément, et qui lui inspirera quelques années plus tard l'une de ses nombreuses séries en creator-owned, l'excellente Deadly Class, qu'il imaginera avec le non moins génial Wes Craig. C'est durant ces années troubles, et celles qui vont suivre, que le jeune Rick Remender va se tourner vers les drogues pour combattre le mal qui le ronge : un pessimisme profondément enfoui dans son esprit. Il est alors animateur, et travaille sur des projets aussi variés que Le Géant de Fer, Anastasia ou l'oublié Titan A.E, deux des dessins animés de la Fox, qui tentait alors de jouer des coudes avec Disney, et de quelle manière. Un boulot qui ne lui convient guère, et qu'il va choisir de quitter pour se tourner vers le monde des comics.

Marquant l'écart avec l'animation, Remender n'écrit pas tout de suite pour autant. En qualité d'animateur et d'autodidacte, il va créer, en 1998, le comic book Captain Dingleberry, aux côtés de Harper Jaten et Rory Hensly. Une série volontairement absurde qui sera auto-éditée (déjà, on sent le désir d'indépendance du jeune homme) pendant quatre numéros avant d'être récupérée par SLG Publishing. La première aventure d'une longue série, puisque Remender fera également équipe avec SLG pour sa seconde série, Black Heart Billy. Des prémices dans le milieu du comic book qui ne l'empêcheront pas de persévérer dans l'animation puisque entre 2000 et 2003, le bonhomme va créer et réaliser la série d'animation Swing Town, pour Wild Brian Animation. En parallèle, il continue de nous offrir quelques comics et de proposer des couvertures pour Fat Wreck Chords, un label de musique Punk, genre qui va considérablement influencer son art et le sujet de ses futures séries, et qu'il vivait à fond dans la fin des années 80 et le début des années 1990.

Sa polyvalence, ou plutôt sa multi-spécialisation, va alors le conduire jusqu'à enseigner les comics, l'animation et les storyboards à l'Academy of Art University, tandis qu'il encre la série The Avengers pour Marvel et dessine plusieurs numéros de Teenage Mutant Ninja Turtles. C'est un vrai tournant qui s'annonce ensuite pour Remender, qui en 2004, entame sa longue collaboration avec la maison Image Comics en publiant Fear Agent (disponible chez Akileos en France) son premier gros titre en creator-owned, mais aussi Sea of Red et Strange Girl. Il multiplie d'ailleurs les créations, passant d'une drogue à l'autre en trouvant une seconde jeunesse - et une créativité folle - dans l'écriture. On le retrouve ainsi sur Night Mary chez IDW, ou encore sur les dessins de la série de The Last Christmas, écrite par Brian Posehn et Gerry Duggan, chez Dark Horse. Il noue également de premières belles relations artistique, avec notre frenchie Paul Renaud sur Red Sonja, par exemple, ou encore avec Kieron Dwyer sur XXXombies, sa troisième collaboration avec le monsieur après Sea of Red et Night Mary.


Autant de travaux - on pourrait également citer The End League chez Dark Horse ou la mini-série d'horreur Sorrow chez Image - qui lui permettent d'attirer la curiosité des Big Two. Et le cœur de Rick Remender penchera vers Marvel, chez qui il signe une partie de Punisher : War Journal (aux côtés de Matt Fraction) avant de devenir l'auteur de la huitième série consacrée aux aventures de Frank Castle. Son travail sur le vigilante le conduira d'ailleurs à signer un contrat d'exclusivité avec la maison des idées, qui bien heureusement, l'autorise à poursuivre ses séries en indépendant. Ainsi, on le retrouvera ensuite aussi bien du côté de Marvel, avec Uncanny X-Force ou encore Captain America, que du côté du creator-owned, puisqu'il crée, en 2009, Last Days of American Crime, aux côtés de Greg Tocchini, futur dessinateur de Low.

Mais sa carrière prolifique dans le milieu ne suffit pas à maintenir l'hyper actif en place etil se tourne alors vers un média en pleine expansion, le jeu-vidéo, en signant le scénario du tout premier Dead Space ou encore celui du déjanté Bulletstorm d'Epic Games, sorti en 2011. Pour la petite anecdote, se ne sont pas ses premiers pas dans le monde vidéo-ludique puisqu'il avait  déjà officié en tant que Story Boarder sur l'adaptation en jeu-vidéo de Bons Baisers de Russie, l'excellent titre James Bond sorti en 2007 sur nos consoles. Un parcours qu'on pourrait voir comme un écho de sa courte carrière du côté de la musique, puisque le bonhomme a effectivement signé les couvertures de plusieurs disques de Punk, dont la compilation Star Your Engines, la galette Live In A Dive de No Use for a Name, l'EP Never Trust a Hippy de NOFX ou encore quelques visuels promotionnels pour 3 Inches of Blood.

Depuis, le tentaculaire artiste se concentre sur la création de comic books indépendants, lui qui estime avoir choppé une "maladie" en s'adonnant si longtemps au creator-owned : il n'est désormais plus assez souple pour se plier aux exigences de Marvel et de son cahier des charges, et préfère ainsi raconter l'une des nombreuses histoires qui trottent dans sa tête. Et pour soulager son esprit, le scénariste écrit même plusieurs titres à la fois, puisqu'on le connaît désormais, et simultanément comme l'auteur de Black Science, qu'il réalise aux côtés de Matteo Scalera, de Low, de Deadly Class et plus récemment encore, de Tokyo Ghost (on pourrait également rajouter le tardif Dévolution paru chez Dynamite), quatre séries publiées par Image Comics aux Etats-Unis, et qui sont à l'image de la carrière du bonhomme, de son talent et de ses thèmes favoris. Si bien qu'on pourrait voir ces quatre séries comme autant d'étapes rencontrées par Rick Remender dans sa passionnante carrière.

Le jeune héros de Deadly Class, qui lutte contre ses démons en pleine Amérique de Reagan, rappelle en effet l'adolescence troublée du jeune Remender, et la révolte qui animait son esprit alors. A l'inverse, Low nous présente une héroïne qui ne transigera pas sur son optimisme, même dans un monde sous-marin qui s'est abandonné à la décadence en attendant les derniers jours de la Terre. Un pitch qui n'est pas sans rappeler la mutation de l'auteur, qui dans la préface de l'œuvre, explique que la thérapie qu'il avait suivi dans sa jeunesse, mais aussi les conseils d'un ami et les Illusions de Richard Bach l'avaient conduit d'un pessimisme angoissé à un optimise pur et finalement, lumineux. Une forme d'espoir qu'on retrouve dans Tokyo Ghost, une romance sur fond de drogues, numériques cette fois, qui renvoie à la vie privée de son auteur, papa et amoureux depuis quelques années. Enfin,  Black Science, qui est peut-être ce que le scénariste a produit de mieux, est une gigantesque métaphore (en forme de voyage dans le temps et l'espace) sur les remords, les regrets et les occasions manquées. Un parcours teinté de science-fiction qui rappelle la carrière en rebonds d'un auteur qui est désormais en paix avec lui-même et qui comme Grant, le héros de Black Science, ferait n'importe quoi pour sa famille. Comme quoi à elles seules, les plus récentes créations de l'auteur forment un superbe reflet de la vie de leur auteur, qui n'hésite jamais à briser sa narration pour faire profiter le lecteur de ses enseignements. 

C'est un fait, Rick Remender ne tient pas en place. Son parcours, d'un média et d'un genre à l'autre, le montre bien. Sa créativité folle, qui accouche parfois de concept si tarés que l'auteur a du mal à les contenir en quelques pages, en atteste aussi. Mais c'est justement ce parcours très erratique qui a forgé la réputation de l'auteur. Ça et une humilité, une sincérité qu'on remarque dans la plupart de ses travaux, où l'auteur semble toujours, à un moment ou l'autre, se mettre à nu. Une façon, pour lui, de se remémorer les étapes d'une vie qui l'inspirent et qui donnent à ses écrits une énergie incomparable. Une façon aussi, pour nous, d'écouter plus attentivement encore un scénariste qui pour toute une génération de lecteurs, est devenu le papa bienveillant dont nous rêvons tous, et qui nous offrira sans doute un nouveau cadeau dès demain en la personne de Seven to Eternity, aux côtés de Jerome Opena et Matt Hollingsworth.

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