Il y a quelques mois, on vous parlait avec enthousiasme du début de Spider-Island, le dernier d’une longue série d’events Spider-Man. Trois mois et six numéros plus tard (Amazing Spider-Man #667 à 672) l’heure est au bilan définitif. Et n’y allons pas par quatre chemins, il est excellent. L’arc imaginé par Dan Slott (Avengers : The Initiative, She Hulk) et Humberto Ramos (X-Men, Crimson) est tout simplement le meilleur spider event depuis au moins dix ans.
Rappelons brièvement le pitch : suite à une invasion de punaises génétiquement modifiées par Le Chacal, les habitants de Manhattan se retrouvent presque tous dotés des pouvoirs de Spider-Man. Hélas ce grand pouvoir ne s’accompagne pas chez tout le monde de grandes responsabilités, et un chaos indescriptible s’empare de l’île. L’histoire elle-même se divise en trois actes, parfaitement maîtrisés par un Dan Slott qui gère impeccablement le rythme de son récit. On a d’abord la réponse dans l’urgence à la première vague de Spider-New Yorkais, et surtout aux gangsters enrôlés par le Chacal et son éminence grise pour semer la panique. Tous les héros sont de sortie et notre cher tisseur est un peu dépassé, même s’il se reprend à la fin grâce aux conseils de Mary Jane.
L’acte deux c’est la descente aux enfers. Les « infectés » commencent à se transformer en véritables araignées géantes et il devient urgent de trouver un remède à l’infection. Anti Venom (Eddie Brock) et Alistair Smythe seront mis à contribution, mais tout ne se passera pas comme prévu, vous vous en doutez bien. C’est aussi à ce moment qu’on apprend l’identité de la véritable méchante de l’histoire : The Queen. Cette victime du projet super soldat avait été créée par Paul Jenkins (Inhumans, The Sentry) il y a quelques années dans Spectacular Spider-Man (#15 à 20) et sa fascination pour les araignées en fait un choix logique de la part de Slott.
L’acte trois c’est bien sûr le dénouement, mais pas avant que les choses n’empirent, entre autre à cause d’uneMadame Web (Julia Carpenter, ex-Arachne) qui a du mal à envisager toutes les conséquences de ses actes. Heureusement un autre personnage intervient à son tour : Kaine, le premier clone de Spidey, jusque là transformé en Tarantula par Le Chacal et soumis à The Queen. Il nous prépare là sa future reconversion en // ATTENTION PETIT SPOILER\\ Scarlet Spider, et joue un rôle essentiel. Mais le meilleur c’est la façon dont Peter sauve la situation. Slott trouve en effet une pirouette scénaristique extrêmement inspirée qui ne se résume pas à voir le héros trouver une arme surpuissante et taper très fort avec (à bons entendeurs…).
Spider-Island s’avère donc être une histoire remarquablement écrite, spectaculaire, à la fois épique, dramatique et drôle. Les rebondissements s’enchaînent parfaitement et les moments cultes sont légions. Spider kung-fu, révélation que tel ou tel personnage a acquis des pouvoirs (Carlie, MJ, Jonah (!) et même le Shocker), retournements de situation in extremis et même la découverte de l’identité du mystérieux « numéro six », le seul membre d’Horizon Lab (là où Peter travaille) encore inconnu. Et ce final !
Les personnages sont totalement maîtrisés par l’auteur. La relation entre Peter Parker et Carlie Cooper, sa petite amie, prend une nouvelle dimension quand celle-ci acquiert des pouvoirs. Mary Jane, elle, a droit à sa plus belle heure de gloire. La rouquine hérite aussi de pouvoirs (plus tard que les autres, pour une raison hilarante), mais elle n’en avait pas besoin pour être une héroïne. C’est une véritable déclaration d’amour que Slott lui écrit, trouvant enfin le ton juste pour un personnage qui a embarrassé plus d’un auteur. Le scénariste trouve aussi le bon équilibre pour Jonah Jameson, entre barbon acariâtre et personnage plus sérieux. Il corrige bien le tir pour Le Chacal et la seule chose qui pourra faire tiquer c’est la « Ben Reillysation » de Kaine (surtout dans sa relation avec Peter, mais aussi dans l’attitude). On est en effet loin du psychopathe déchaîné et torturé des années 90. Mais en même temps ça le rend beaucoup plus intéressant dons on ne s’en plaindra pas. Et puis ce mouvement avait déjà été annoncé dans The Grim Hunt, l’event précédent.
Ce qui nous amène à l’autre force du récit de Dan Slott : sa capacité à utiliser à bon escient énormément d’éléments épars semés au fil des numéros précédents. Il y a bien sûr les leçon de kung-fu de Peter, mais aussi Anti Venom et son pouvoir de « purification », le récent retour de The Wraith, les divers costumes mis au point par Spidey et même quelque chose remontant à Amazing Spider-Man#600. Et ce ne sont que quelques éléments parmi d’autres…
Enfin, cerise sur le gâteau, les dialogues regorgent de répliques géniales. Entre vannes sur la saga du clone (« She’s no Gwen Stacy. Seriously you couldn’t pay me to clone her. »), délires méssianiques d’Eddy Brock, moments touchants entre Peter et Carlie, one-liners désopilants d’un Kaine géné (« Wallopin’ web-snappers ») et moments plus sérieux, tout est juste et jamais grandiloquent ni ridicule. Et que dire de ces trois mots prononcés par MJ à la fin du dernier numéros…
Editorialement par contre il y a des choses à redire, surtout au niveau des tie-ins (la plaie de tout event). Certains ne sont la que pour faire vendre (Black Panther), et la plupart sont au mieux sympathiques (Spider Woman), au pire décevants (Avengers, Herc) et surtout loin d’être indispensables. Le seul vraiment pertinent c’est Venom #6 à 8, puisque c’est là qu’on apprend en premier la véritable identité de Spider King (un grand blond qui a déjà eu maille à partir avec The Queen…). Mais on peut aussi faire sans, Slott mentionnant toujours ce qui doit l’être. Du coup ces petits ratés ne pénalisent en rien l’histoire.
Au dessin on a droit à du grand Humberto Ramos. Son style cartoony est toujours aussi efficace et dynamique. Il colle parfaitement à l’histoire et à son ambiance, parfait mélange de légèreté et de sérieux. Tout est toujours parfaitement lisible malgré un grand nombre de scènes chaotiques, et les splash pages sont comme un régal pour les yeux. Si Mark Bagley et John Romita Jr furent les spider-artistes des années 90, Ramos est incontestablement celui des années 2000.
Bref vous l’aurez compris, Spider-Island est une excellente histoire et même plus : un nouveau classique pour le tisseur. Scénario impeccable de bout en bout, dialogues géniaux, personnages parfaitement traités, dessin irréprochable, il mérite bien la note suprême.
Les plus : Le scénario
Les dessins
Les dialogues
La fin
Tout…
Les moins : Euh…
Notes
Scénario : 5/5
Dessin : 5/5
Globale : 5/5