Après une vie de bons et loyaux services dans le monde des comics, Joe Kubert s'est éteint le 12 Août dernier. Avec cette perte immense, c'est le dernier géant de l'Âge d'Or qui nous quitte, laissant deux fils tout aussi talentueux que lui et orphelins d'un père qui aura tant fait pour notre médium et ses fans pour qui il représentait la figure de l'honorabilité et de la fidélité à toute épreuve.
Les premières années de Joe Kubert sonnent presque comme un lieu commun tant son histoire ressemble à un film de Martin Scorcese avec un filtre sépia bien comme il faut. Il naît dans une communauté juive en Pologne le 18 Septembre 1926, et il n'a que quelques mois quand sa famille immigre aux Etats-Unis dans ce quartier de Brooklyn qu'on appellera plus tard Little Odessa. Comme tant d'autres familles juives dans ses années-là, fuyant la pauvreté et attirées par la promesse d'un avenir plus radieux en ce Nouveau Monde.
C'est donc dans ce Brooklyn plein d'effervescence où se côtoient tous ceux qui vont devenir les grands noms de la culture américaine de l'Après-Guerre, les futurs pontes du journalisme, de la littérature ou de la musique, qu'il grandit. Pour renforcer l'image d'Epinal, son père est un pilier de la communauté juive, en étant un boucher kasher. Et dès l'enfance, Joe Kubert va montrer son intérêt pour le dessin, encouragé par ses parents qui feront tout pour qu'il réussisse une carrière d'artiste. Il devient vite évident qu'il fera du dessin son avenir, il dessine dès l'âge de 11 ans des petits comic strips pour le journal local, et à l'âge de 13 ans, il réalise ses premières pages pour ce qui deviendra plus tard l'éditeur Archie grâce à l'un de ses camarades de classe dont le père travaillait dans cette maison de publication basée dans Brooklyn même.
Il va réussir à rentrer à la Manhattan's High School of Music and Art, déjà une institution à l'époque. Il va y rencontrer l'un de ses futurs collaborateurs, Norman Maurer, qui est connu entre autre pour avoir produit et écrit les dessins animés des Stooges ou Scooby-Doo. C'est aussi là qu'il va établir des contacts avec de nombreuses maisons d'édition de comics qui se créent presque chaque jour à cette époque et il va y faire de nombreux petits jobs de finition ou de remplissage. On peut tout de même citer parmi ces travaux quelques numéros de Blue Beetle pour Fox Comics (qui sera par la suite racheté par DC Comics) ou la recolorisation des Spirit de Will Eisner (un procédé qui ne date pas d'aujourd'hui donc, loin de là).
Il va après cela faire ses premiers pas chez DC Comics, qui s'appelle alors encore All-American Comics. Il n'a alors que dix-sept ans, et il va dessiner les cinquantes pages de Seven Soldiers of Victory qui paraissent dans Leading Comics #8. Il va encore faire quelques indiscrétions du côtés de petits éditeurs à côté, mais deux ans plus tard, il débute son long run sur Hawkman avec Flash Comics #62. C'est véritablement là qu'il va se faire un nom (alors qu'il n'a pas encore atteint la vingtaine) avec un style très détaillé pour l'époque et incroyablement souple et plein de mouvement, ce qui n'était pas du tout la norme alors.
Le succès croissant, il se retrouve responsable éditorial chez St. John Publications où il retrouve son camarade de classe avec qui il avait ciré les bancs de l'High School of Music & Art, le fameux Norman Mauer. Avec lui, il va innover en lançant le premier comics en 3D (on est alors en 1953 !) qui réalisera l'exploit de se vendre à plus d'un million de copie alors qu'il vaut plus du double d'un comics standard. Concrètement (on vous assure, ce n'est pas pour vous faire rager), il se vendait à 25 cents pièce. Une fortune on vous disait !
Moins anecdotique, il va, toujours avec Norman Mauer, créer le personnage Tor, un héros datant de la Préhistoire. Il deviendra très vite leur personnage principal, et il va connaître une longue carrière éditoriale, à travers plusieurs éditeurs, Eclipse Comics, Epic (la branche creator-owned de Marvel dans les années 80) pour enfin retomber chez DC Comics, ce qui permettra à Joe Kubert de pouvoir retravailler sur lui en 2008 pour une mini-série en six épisodes.
Et après un petit tour par EC Comics, Joe reviendra vers DC pour écrire sa légende...
En 1955, Joe Kubert retourne chez DC Comics pour dessiner Our Army At War. Un comics militaire qui va devenir sa spécialité. Il n'attendra pas un an pour signer un contrat d'exclusivité avec la Distinguée Concurrence. Il va alors dessiner Viking Prince, mais surtout il fera son grand retour sur Hawkman qui va être l'un des plus gros hit des années 50 chez DC. Puis il va lancer ce qui sera sans doute son titre le plus emblématique, G.I. Combat, dans lequel on va trouver des aventures de Sgt. Rock et de Haunted Tank.
Etabli comme l'un des artistes les plus importants et les plus influents durant cette période (durant laquelle vont aussi naître son quatrième et son cinquième enfant, Adam et Andy), DC Comics va lui proposer en 1967 le poste de directeur de publications. Il va alors superviser des titres basés sur l'oeuvre d'Edgar Rice Burroughs tels que Tarzan (qu'il va aussi dessiner) et Korak.
Au terme de cet engagement, il va fonder la Kubert School, qui va devenir l'une des écoles pour dessinateurs de comics les plus réputées au monde. Ses deux derniers fils y étudieront avant d'y tenir eux-même une chaire de professeur. On ne pas vous faire la liste exhaustive de tous les grands artistes de comics qui y sont passés tant leur nombre et imposant, mais en morceaux choisis, on retrouve Amanda Conner, Shane Davis, Matt Hollingsworth, Scott Kolins, Alex Maleev, Tom Mandrake, Rags Morales, Tom Raney, Adam Warren ou encore Lee Weeks. Du beau monde en somme.
< Chapitre précédentSes premiers travauxChapitre suivant >Ses derniers travauxUne fois sa réputation établie, il s'est consacré à des oeuvres caritatives ou auxquelles il croyait moralement, montrant l'engagement et l'intégrité d'un artiste qui n'a jamais fléchi. Il va par exemple illustrer de nombreuses histoires pieuses pour une oeuvre et un magazine juifs. Il va aussi adapter en comics des lettres venues d'un auteur de bande-dessinée bosniaque durant la guerre qui a ravagé Sarajevo. Il fera en sorte d'aider cet homme et sa famille alors qu'ils étaient bloqués chez eux pendant les bombardements incessants. Autre preuve de son dévouement pour les autres, et du respect qu'il a toujours eu pour les militaires, il illustrera de nombreuses plaquettes à destination des soldats.
"Joe Kubert était un ami, un professeur, une influence et un géant."
Les premières années de Joe Kubert sonnent presque comme un lieu commun tant son histoire ressemble à un film de Martin Scorcese avec un filtre sépia bien comme il faut. Il naît dans une communauté juive en Pologne le 18 Septembre 1926, et il n'a que quelques mois quand sa famille immigre aux Etats-Unis dans ce quartier de Brooklyn qu'on appellera plus tard Little Odessa. Comme tant d'autres familles juives dans ses années-là, fuyant la pauvreté et attirées par la promesse d'un avenir plus radieux en ce Nouveau Monde.
C'est donc dans ce Brooklyn plein d'effervescence où se côtoient tous ceux qui vont devenir les grands noms de la culture américaine de l'Après-Guerre, les futurs pontes du journalisme, de la littérature ou de la musique, qu'il grandit. Pour renforcer l'image d'Epinal, son père est un pilier de la communauté juive, en étant un boucher kasher. Et dès l'enfance, Joe Kubert va montrer son intérêt pour le dessin, encouragé par ses parents qui feront tout pour qu'il réussisse une carrière d'artiste. Il devient vite évident qu'il fera du dessin son avenir, il dessine dès l'âge de 11 ans des petits comic strips pour le journal local, et à l'âge de 13 ans, il réalise ses premières pages pour ce qui deviendra plus tard l'éditeur Archie grâce à l'un de ses camarades de classe dont le père travaillait dans cette maison de publication basée dans Brooklyn même.
Il va réussir à rentrer à la Manhattan's High School of Music and Art, déjà une institution à l'époque. Il va y rencontrer l'un de ses futurs collaborateurs, Norman Maurer, qui est connu entre autre pour avoir produit et écrit les dessins animés des Stooges ou Scooby-Doo. C'est aussi là qu'il va établir des contacts avec de nombreuses maisons d'édition de comics qui se créent presque chaque jour à cette époque et il va y faire de nombreux petits jobs de finition ou de remplissage. On peut tout de même citer parmi ces travaux quelques numéros de Blue Beetle pour Fox Comics (qui sera par la suite racheté par DC Comics) ou la recolorisation des Spirit de Will Eisner (un procédé qui ne date pas d'aujourd'hui donc, loin de là).