Il est l'heure de parler comics. Second numéro d'Avril, qui arrive sur le fil, afin que vous le découvriez. On commence avec la fin du By The Way consacré à la mort dans les comics, en se penchant sur le pendant de celle-ci: la résurrection. Ensuite trois petits Focus, tous en indés. Dans son Corner, Steeve s'attardera sur les débuts laborieux d'Uncanny Avengers et comparera la série à sa grande sœur, Uncanny X-Force. Le Who Dat ? vous fera découvrir non pas un mais deux personnages cette fois, pour mieux compenser le Reviews Express le plus famélique depuis la création de la rubrique. Heureusement qu'il y a des bonnes choses dedans. Et on finit comme toujours par Eye Candy, a propos duquel une annonce sera bientôt faite sur le Facebook du site. Gardez les yeux ouverts, et bonne lecture !
La première partie de ce dossier ayant été consacrée au moyen et au mobile de la mort d'un personnages, l'heure est désormais venus de s'intéresser à ce qui se passe après...
La mort vous va si bien (2ème partie)
Death Is Just A Feeling
On arrive là au point le plus épineux de toute discussion à propos de la faucheuse et des comics : le caractère éminemment transitoire de cet état. Je l’évoquais en introduction, à peu près tous les personnages majeurs ont eu droit à leur mort supposée définitive et à un retour triomphal. Vous ne me croyez pas ? Allons-y pour un petit inventaire.
Superman ? Death Of Superman, et il s’en est remis. Batman ?Batman RIP puis Return Of Bruce Wayne. Captain America ? Tué par Crossbones dans l’épilogue à Civil War (Captain America #25), revenu dans Captain America Reborn. Cyclops ? Se sacrifie pour vaincre Apocalypse (Uncanny X-Men #378), puis se « dé-sacrifie » grâce à Cable et Jean Grey (Search For Cyclops). Hal Jordan ? Mort pour sauver le monde (Final Night), ressuscité dans Days Of Judgement en tant que Spectre. Thor ? Ragnarok (Thor vol 2 #80-85), puis de retour dans sa nouvelle série. Et on pourrait continuer l’énumération ad nauseam (Flash, Green Arrow, Hawkeye, Iron Man, ¾ desFantastic Four…). A noter, détail surprenant, qu’à ma connaissance Wonder Woman a toujours été épargnée. Elle, on se contente d’annuler sa série.
Bref, la mort on s’en remet très bien. Il semble cependant pertinent d’opérer une distinction au sein de cet ensemble de « morts temporaires » (ou « fausses vraies morts »). Certaines avaient clairement vraiment vocation à être définitives (Flash, Green Lantern, Green Arrow…). Le retour du héros s’est fait plusieurs années plus tard, et sous la houlette de créateurs et d’équipes éditoriales différentes. Mais dans certains cas, le meurtrier et l’artisan de la résurrection sont une seule et même personne (ou un même groupe de personnes). Ce fut le cas pour Captain America, tué et ramené à la vie par Ed Brubaker. Ou de Batman, avec Grant Morrison aux manettes. Brian Bendis a aussi joué avec la vie d’Hawkeye, tué dans Avengers Disassembled et ressuscité dans House Of M.
Dans ces cas, et malgré le délai
parfois important séparant la mort et le retour (plusieurs années parfois), on
peut légitimement supposer que le scénariste avait d’emblée dans l’idée de
ramener sa victime à la vie. On se situerait donc dans le cadre d’une variante
élaborée de la « mort cliffhanger »,
une version poussée à son paroxysme de cette « ficelle ».
No Way Back
La résurrection paraît donc inéluctable pour nos chers défunts. Mais il existe cependant quelques exceptions à cette règle immuable, des morts que nul ne semble décidé à remettre en cause. Les retours de Bucky (sidekick de Cap America revenu en tant que Winter Soldier) et Jason Todd (ex Robin 2 devenu Red Hood), longtemps tabou et finalement survenus, ont mis un sacré coup à cette idée, mais il reste quelques défunts « intouchables ».
On peut les compter sur les doigts d’une main : L’oncle Ben (oncle de Peter Parker aka Spider-Man), Gwen Stacy (feue la petite amie du même Spidey), Thomas et Martha Wayne (parents de Batman),). On peut éventuellement en ajouter un ou deux autres à la marge (la famille Castle (famille du Punisher), les parents de Peter Parker…) mais pas plus.
Premier constat, il ne s’agit pas de héros. Soyons juste, à part Gwen Stacy, ce ne sont même pas des personnages qu’on a vraiment vus dans les séries où ils auraient pu apparaître (on ne voit l’oncle Ben que dans Amazing Fantasy #15, première apparition du tisseur). Mais ce n’est pas là la clé du mystère. Harry Osborn aussi était un second rôle, mais lui a quand même eu droit à sa résurrection. En fait, si ces personnages sont toujours six pieds sous terre, c’est parce que leur mort est un acte fondateur pour le héros qui y est lié.
Sans la mort de ses parents, Batman perd la motivation originelle de sa croisade contre le crime. Son oncle ressuscité, Spidey ne porte plus le poids de la seule fois où il a fui les responsabilités que lui conféraient son grand pouvoir, et c’est l’âme du personnage qu’on perd. La mort de Gwen, c’est la mort de l’innocence (elle prend quasiment une dimension méta-textuelle), le symbole des risques qu’encourent tous ceux qui sont proches de Spidey…
La mort de Captain Marvel premier du nom est quant à elle un cas un peu particulier. Cela car elle fait partie des Classiques non seulement par son côté tragique, mais aussi par sa dimension « réaliste » (il est emporté par un cancer). Une résurrection porterait atteinte à ce dernier point. Mais surtout cette mort est la plus belle heure de gloire du personnage. Il s’agit donc en quelque sorte d’un acte fondateur, sinon du caractère du héros, du moins de son aura, son côté mythique. Bref de ce qui pourrait justifier la tentation de le ressusciter. Donc « annuler » sa mort, c’est aussi nier ce qui justifie justement l’envie de le ressusciter. Et le serpent se mordit la queue…
A noter que l’indifférence relative suscitée par le personnage et sa mort aux yeux des lecteurs peut aussi être une explication plausible, malgré son cynisme. Thunderbird, défunt X-Man tombé lors de sa première mission ne fut jamais ressuscité sinon le temps de l’un ou l’autre crossover (Necrosha, Chaos War) et toujours pour retourner à son repas de pissenlits par la racine. Il faut dire que si ce décès a marqué les X-Men, il n’a cependant pas plus émus les lecteurs que ça, qui n’ont pas eu le temps de s’attacher au personnage ni même de le rendre culte. D’où la pérennité de son décès.
Mais pour en revenir aux exemples précédents, il s’agit donc de cas où ressusciter le personnage viendrait porter atteinte au héros, l’abimer en le privant d’un ressort psychologique essentiel (littéralement, qui touche à son essence). C’est aussi pour ça que Jason Todd et surtout Bucky ont pu être ramenés à la vie : leur mort n’était pas (ou plus) à proprement parler un « acte fondateur ».Comeback Kids
La mort de Bucky a pu être une partie importante de la psychologie de Captain America lors de son « réveil » dans les années 60. Mais depuis elle était devenue un cliché. Cap n’était pas défini par la façon dont il portait son deuil, mais par son héroïsme et sa détermination à toujours faire ce qui est juste. C’est moins vrai pour la mort de Jason Todd, qui se rapprocherait à priori assez de celle de Gwen Stacy pour son côté « symbole des risques encourus ». Mais on pourrait arguer que puisqu’il a repris un sidekick par la suite, Batman a su surmonter cette mort, faire son deuil, et que par conséquent elle avait perdu son caractère d’ « acte fondateur » (alors que Peter Parker continue de garder son identité secrète pour protéger les siens). Ou considérer que Batman a eu bien d’autre raison de réaliser les dangers de son activité pour ses proches (The Killing Joke) et que donc la mort de Jason n’était plus un symbole aussi fort que celle de Gwen.
Ou, de manière plus cynique, on
peut aussi dire que tous ces chers défunts (Gwen, oncle Ben, les Waynes…) ne
risquent pas d’avoir leur série régulière, et que donc ça ne vaut pas la peine
de braver l’ire des fans pour les ressusciter. Ça expliquerait aussi pourquoi
certains personnages restent décédés dans l’indifférence générale, n’est-ce pas Blue Beetle (Ted Kord) et Black Goliath ?
What Is It Good For ?
L’ire des fans justement, étonnamment bien plus terrible lorsqu’on parle de ramener un personnage à la vie que quand on l’envie ad patres. Peut-être est-ce dû au fait que justement la mort donne un caractère noble à un récit (voir plus haut) et que la résurrection viendrait appauvrir cela. Finalement le drame n’en serait plus un. Pire, il deviendrait farce. Et si tout le monde revient tout le temps, comment se sentir impliqué dans une mort ? Ce ne serait plus un ressort dramatique, mais une ficelle grossière.
Mais est-ce si grave ? Une résurrection porte-t-elle toujours atteinte à la mort qui l’a précédée ? Pas forcément. Tuer un personnage ne doit pas être une ficelle. Si on le fait, cela doit faire partie intégrante de l’histoire, venir naturellement et avoir un sens. Et dans ces cas qu’en a-t-on à faire si dans six mois ou un an le personnage revient ? La mort de Colossus, se sacrifiant pour éradiquer le virus Legacy en hommage à sa sœur défunte, est-elle une moins bonne histoire depuis que Joss Whedon l’a ramené à la vie ? Ragnarok est-elle devenue une saga moins poignante depuis que Joe Strazscynski à relancé la série Thor ? Assurément pas. Une bonne histoire reste une bonne histoire en elle-même, pas pour ses retombées. Ou alors il faut retirer à The Killing Joke ses galons de classique depuis que Barbara Gordon remarche.
En fait le vrai problème, ce n’est pas la résurrection, c’est quand la mort est mauvaise, voire qu’elle devient une figure imposée. Il semble en effet y avoir chez les scénaristes une propension critiquable à toujours vouloir avoir au moins un mort par gros event histoire d’être pris au sérieux. L’exemple récent le plus infâme fut sans doute la « mort » de Thor à la fin de Fear Itself, des plus gratuites et peu crédibles. A croire qu’on ne peut pas raconter une bonne histoire sans tuer quelqu’un. Et puis une résurrection, même si elle est bancale (Jason Todd, ramené à la vie par une crise de nerfs de Superboy Prime frappant les « murs de la réalité » ou je ne sais plus trop quoi…) ouvre la porte à de bonnes histoires dans l’avenir. Alors que la mort prive les créateurs d’un jouet parfois génial.
Bon ce dernier point est quand même à tempérer. D’une part parce qu’une mort peut donner lieu à de bonnes histoires aussi au-delà du seul numéro où elle se produit (la mort de Cap America par exemple donna lieu aux one-shots Fallen Son, plutôt réussis). Mais surtout, même si je veux bien ne pas être trop regardant sur la façon dont un personnage est ramené à la vie, préférant me focaliser sur l’avenir, il y a des limites.
Tuer et ressusciter des
personnages est devenu si commun que maintenant certains auteurs ne prennent
même plus la peine de bricoler un prétexte. Ainsi Starlord et une bonne partie des Guardians Of The Galaxy étaient morts dans The Thanos Imperative avant de réapparaître dans Avengers Assemble. Et en guise
d’explication on a un regard narquois de
Starlord à travers le quatrième mur. Ce n’est pas que je ne me réjouisse pas de
leur retour, mais là on est face à une grosse faiblesse de la narration qui
pourrait devenir vraiment gênante si elle devait se généraliser. Que tout ne
soit pas vraisemblable soit, mais pas au point que ce soit du n’importe quoi
totalement incohérent. Les comics ne doivent pas devenir du mauvais Tex Avery ! Alors messieurs les
auteurs et éditeurs, tuez et ressuscitez tant que vous voulez, mais ne nous
prenez pas non plus pour des billes au-delà du raisonnable…
Peu de Focus cette fois (pour les mêmes raisons que celles ayant mené à la pénurie de Reviews Express), mais deux séries (une régulière et une mini) qui valent vraiment le coup avec Red Team et Amala's Blade. Et le bilan de Mara, par Brian Wood, décevante malgré son potentiel...
#review RedTeam 1-2 Les autopsies froides et calculées de meurtres par ceux qui ne se voient pas comme des justes. Polar noir brillant 4/5
Red Team est le
nouveau polar de Garth Ennis et Craig Cermak. C’est l’histoire d’une
équipe de flics d’élite qui décident d’assassiner les criminels qu’ils ne
peuvent pas coincer légalement. Un pitch certes
déjà vu (Rien que dans Gangster Squad
récemment) mais traité avec génie par Ennis. On est loin de l’ultra violence et
de l’humour noir habituels du scénariste. Ici c’est tout en sobriété. Rationnel
et réaliste. Clinique. Et c’est pour ça que ça marche si bien. Les 4 flics sont
méthodiques, débarrassés de toute passion. Chaque numéro raconte un meurtre, de
la préparation à l’exécution. Et ça met remarquablement mal à l’aise. Parce
qu’on sait que ce qu’ils font est mal, mais ils rendent ça logique. Et les
protagonistes restent remarquablement humains, malgré leur froideur apparente.
Elle n’est que façade. Ajoutez des dialogues excellents et un dessin splendide,
et vous avez une vraie perle.
#review Amala'sBlade 0 Le #0 parfait, vraie histoire courte présentant l'univers pirates/cyber-steampunk et l'héroïne très charismatique 4/5
Amala est une
assassin. Sa cible du jour : un pirate. Et voilà pour l’histoire. Un stand-alone remarquable car en plus de
narrer une péripétie plaisante (l’action est spectaculaire et les combats
remarquablement chorégraphiés) il pose les jalons d’un univers attrayant. On
est intrigué par les multiples fantômes qui suivent l’héroïne (entre Superior Spidey et 5 Ghosts c’est à la mode en ce moment). Comment ne pas aimer l’idée
qu’elle soit l’élue chargée de ramener la paix dans un monde divisé entre purifiers et modifiers, mais qu’elle ait refusé cette charge ? Amala est
d’ailleurs intéressante, mélange d’arrogance, de fureur à peine contenue et de
regrets. On a envie de la suivre. Enfin les designs sont excellents, entre
steam et cyberpunk. Le trait est stylisé, parfois brut de décoffrage (ce qui
semble devenir une « patte Dark
Horse ») mais remarquablement efficace. Vivement la mini (disponible à
l’heure où vous lirez ça).
#review Mara 4 Trop beau et bien dialogué pour avoir moins, trop lent et au final vide pour avoir plus. Ne dépasse pas son pitch en fait 3/5
La mini-série Mara
est un concentré des plus grandes forces et des pires défauts de Brian Wood. Le pitch : une jeune
femme, star du volley dans une société vénérant les athlètes à grands coups de
sponsors (non, pas la notre…) manifeste des aptitudes surhumaines lors d’un
match en direct. Et on ne va pas plus loin. Wood aime prendre son temps, mais
en quatre numéros il attend le dernier pour qu’enfin l’apparition des pouvoirs
de Mara ait une VRAIE conséquence (l’armée veut l’utiliser). Et même là on ne
dépasse pas la déclaration d’intention et ça débouche sur une fin ouverte. A
croire qu’on en est à la moitié de la série, pas au terme. D’un autre côté les
dialogues sont impeccables, on s’intéresse à Mara. Et les dessins de Ming Doyle sont splendides,
retranscrivant avec un réalisme et une puissance exceptionnels la mise en œuvre
des pouvoirs de Mara (quand elle décolle c’est mieux que du Matrix). Hélas ça ne suffit pas.
Uncanny Avengers : le phantôme de Uncanny X-Force
Quand,
en octobre 2010, Rick Remender lançait le premier volume de Uncanny
X-Force son nom n'avait pas encore beaucoup de poids du côté de la
Maison des Idées. La force de Marvel ne réside manifestement pas
dans la capacité de la compagnie à employer beaucoup de sang neuf.
Il reste néanmoins indéniable qu'une fois qu'un scénariste a
réussi à poser un pied chez Axel Alonso et ses potes, les
opportunités ont tendance à fuser pour peu qu'il fasse ses preuves.
Depuis ce mois d'octobre 2010, Remender a plus que fait ses preuves
et est maintenant en charge de ce que Marvel nous a présenté comme
le titre phare de son relaunch, Uncanny Avengers. Ces deux séries
ont plus que leur auteur et un adjectif en commun. Malheureusement,
quand la première a très largement bénéficié de son statut desleeper hit et du quasi-anonymat de son scénariste (par rapport à
la notoriété de la plupart de ses collègues), la seconde souffre
de la comparaison à sa grande sœur et de tout le bruit qui a été
fait autour avant sa sortie.
/! Cet article aborde tout
ce qui peut être dit au sujet de Uncanny Avengers. De l'intrigue en
cours à ce qui a seulement été annoncé ce week-end sur l'avenir
de la série, si vous n'êtes pas à jour et ne souhaitez pas gâcher
votre plaisir de lecture, passez votre route. /!
Continuité
Qu'on ne se
méprenne pas. Je reconnais le talent de Rick Remender (actuellement
dans mon Top 3 de scénaristes du moment) et j'apprécie les
forces de Uncanny Avengers à leur juste valeur. Une de ces forces
est le respect et l'usage à bon escient de la continuité par le
scénariste de Fear Agent. Cette conscience de la continuité
et de l'existence de ses histoires au sein d'un univers partagé
passe à travers un tas d'outils des plus subtiles aux plus
démesurés. Cela peut ainsi aller du discours de Havok du #5 dont je
vous ai parlé ici même il y a deux semaines au meurtre d'unCelestial pas plus tard que dans le #7 sorti cette semaine.
Cette
volonté d'inscrire ses récits dans l'Histoire de l'univers Marvel a
permis à Remender de livrer de très grands moments qui ont fait le
succès de Uncanny X-Force. La reprise magistrale d'éléments de la
décennie 90 a vu le retour de l'ère d'Apocalypse et la poursuite de
la transformation d'Archangel entamée en 1988 dans les pages de
X-Factor. Souhaitant poursuivre cette mise au goût du jour de
concepts délaissés, Remender fait maintenant le choix discutable de
moderniser le concept d'Onslaught dans les pages de Uncanny Avengers.
Pendant sombre d'un Charles Xavier ayant absorbé une part de la
psyché de Magneto, Onslaught est probablement le concept le plus
tordu pondu par Marvel à l'époque où la maison d'édition a frôle
la bankrupt juste derrière la Saga des Clones. La pente sur laquelle
Remender s'engage est forcément plus glissante mais ce n'est pas le
seul problème.
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Uncanny
Avengers est très clairement la suite de Uncanny X-Force. Au-delà
du fait que Remender l'affirme dès qu'il peut, les thèmes abordés
dans les deux séries parlent d'eux-mêmes. L'évolution du mythe
d'Apocalypse en est la manifestation la plus évidente. Aussi, dans
chacun des titres l'équipe présentée est l'incarnation de la
réponse imaginée par ses membres comme étant la plus efficace aux
problèmes des mutants. Le X-Force de Wolverine existait à une
époque où l'espèce mutante était en voie de disparition et était
une équipe black-op pro-active spécialisée dans l'assassinat. La Avengers Unity Squad de Havok existe à une époque où les mutants
assistent à un nouvel âge d'or et se veut comme une publicité
vivante pour la cohabitation humains/mutants. Chaque série est ainsi
la manifestation de ce que le contexte mutant contemporain à sa
parution a de mieux à offrir comme dilemmes, conflits et drames.
Cependant ce n'est pas sans raison que les critiques n'ont pas été
aussi douces envers les débuts de Uncanny Avengers qu'elles avaient
pu l'être avec Uncanny X-force.
Quand Uncanny X-Force
est sorti de nul part, Marvel a fait des pieds et des mains pour bien
nous faire comprendre que Uncanny Avengers était LA série à
suivre. Tous les yeux étaient donc rivés vers le premier arc de la
seconde alors que la première a eu la chance de pouvoir nous prendre
par surprise. Surtout, le premier arc de X-Force s'est clos sur le
meurtre de sang froid d'un enfant des mains de Phantomex alors que du
côté des Avengers on a eu droit à l'apparition de la nouvelle
mouture de Onslaught... Deux visions choquantes, l'une plus
encourageante que l'autre pour l'avenir.
Constance
Le rythme de parution
n'a pas non plus aidé Uncanny Avengers à partir du bon pied.
L'annonce de John Cassaday aux dessins, fer de lance de
l'argumentaire commercial autour de la série, s'est ainsi rapidement
transformé en principal défaut du titre. Non seulement le
dessinateur était lent, il était loin de son meilleur niveau.
Conséquence évidente, un changement d'artiste. Si je n'ai rien
contre Daniel Acuna, son style est à milles lieues de ce qu'on a pu
voir dans les cinq premiers épisodes de la série. L'unité
graphique de Uncanny X-Force était une de ses forces. Principalement
grâce à ses coloristes, le titre a su rester constant pendant 35
numéros et ce malgré les six artistes différents étant passé
dessus.
Le narrateur omniscient n'est pas non plus pour
faire pencher la comparaison du côté de Uncanny Avengers. Outil
narratif tout droit venu de l'âge d'or des comics, il permet par
moments à Remender de pondre de belles répliques (voir le The Quote
du Comic Talk #4), mais a surtout une fâcheuse tendance à plomber
l'intensité de l'action en décrivant exactement ce à quoi le
lecteur assiste. Presque une erreur de débutant, ce défaut est
toujours présent dans les deux derniers numéros qui ont pourtant vu
la qualité de la série monter d'un cran.
Escalade
Cette
volonté de vouloir à tout prix frapper plus fort et faire plus
grand que sur Uncanny X-Force risque de perdre Remender en cours de
route. L'arrivée des quatre cavaliers de la mort des Apocalypse Twins
est annoncée comme étant une « montée en puissance »
par rapport à la mythique Dark Angel Saga. Ainsi, quatre personnages
vont revenir d'entre les morts afin d'affronter l'équipe de Havok.Le Hurleur qui reviendra à la vie pour la seconde fois sous le
contrôle d'un vilain. Sentry, qui avait été tué pour la simple
raison que le personnage était une impasse pour les scénaristes et que
Remender ramène seulement afin d'orchestrer un affrontement entre ce
Superman et Thor. Et Daken et Grim Reaper dont Remender a orchestré
la mort ces derniers mois afin de mieux pouvoir les confronter à
leurs assassins Wolverine et Rogue.
Cette montée en
puissance annoncée fièrement par le scénariste on a pu en avoir un
aperçu sous la forme du meurtre d'un Celestial des mains d'un des
Apocalypse Twins dans le #7. Cet événement unique dans l'histoire de
l'univers Marvel laisse presque de marbre à la lecture tant il
semble expédié. Sans le staff du S.W.O.R.D et quelques autres
personnages pour nous rabâcher par la suite l'importance de l'acte
criminel en question, on en oublierait presque que c'est arrivé une
fois la lecture achevée. Peut-être est-ce l'effet recherché par
Remender. Montrer au lecteur que l'assassinat d'un Celestial n'est que le début des festivités et ne mérite pas
plus d'une page d'exposition. Seulement, ce sont les moments
d'intimité et les drames personnels qui ont jusqu'ici fait la force
et le succès du scénariste et non l'action démesurée.
Risques
Ces
instants, Remender continue d'en parsemer son récit avec justesse.
Il sait toujours changer ses personnages en profondeur et leur faire
traverser des épreuves qui ont du sens. Ce qu'il fait avec Rogue, laSorcière Rouge ou encore Havok mérite d'être applaudi. SonSunfire, sa Wasp et son Wonder Man laissent aussi présager de belles
histoires pour peu qu'on les ait vu. Cependant, si Captain America etThor semblent être jusqu'ici resté en retrait en dehors des combats
c'est certainement parce que que leur destin ne lui
appartient pas totalement pour la simple raison que si quelqu'un a
la priorité sur eux c'est bien Jonathan Hickman. Un problème qui ne
se posait pas à l'époque de Uncanny X-Force.
A l'image de
son Havok, Rick Remender a été promu. Havok est passé de X-Factor
à la tête d'une équipe de Avengers, Rick Remender est passé des
coins obscurs de l'univers Marvel au feu des projecteurs. Une
promotion dont il apprend à appréhender les responsabilités, comme
son personnage. Remender a tout entre les mains pour faire de Uncanny
Avengers un run mémorable. Lui laisser le bénéfice du doute est le
moins que l'on puisse faire lorsque l'on jette un œil à son CV.
Seulement, si ce scénariste de talent venait à se planter, l'échec
serait à la mesure des ambitions qu'il affiche avec fierté. Un drame
que ni lui ni le lectorat ne pourrait souhaiter.
Steeve
Un Who Dat ? un peu particulier puisque pour une fois nous allons nous intéresser non pas à un mais deux illustres inconnus des comics : Thunderbird et Warpath.
John Proudstar, alias Thunderbird, était un apache (d’où son nom de code, inspiré d’une créature de légende issue de ce folklore) et un mutant. Doté d’une force et d’une vitesse surhumaines, il était aussi très résistant et possédait des sens hyper développés. Mais il fut surtout l’X-Man ayant eu la carrière la plus courte de l’histoire.
Il fut recruté par le professeur Xavier en même temps que Storm, Wolverine ou encore Nightcrawler pour aller sauver les premiers X-Men, prisonnier sur l’île vivante Krakoa (dans le célèbre Giant-Size X-Men #1). Et si cette première mission fut un succès, la suivante fut fatale à John. En effet, il mourut dès la première apparition des nouveaux X-Men au sein de leur série historique (Uncanny X-Men #94), pris dans l’explosion d’un avion tandis qu’il essayait d’empêcher le Comte Nefaria de s’enfuir.
Mais ce qui est sans doute le plus marquant à propos de ce décès, c’est sa véritable cause. Thunderbird aurait pu sauter de l’avion. Mais il voulait prouver à tous qu’il était assez fort, et qu’ils avaient tort de ne pas le respecter. Ce mélange d’arrogance, de paranoïa et de bonnes intentions, fut la marque de fabrique de John Proudstar. X-Man réticent, il rejoignit l’équipe pour représenter fièrement son peuple (les apaches, il avait le communautarisme sélectif), et faire taire ceux dont il croyait qu’ils doutaient de lui.
Donnant toujours l’impression d’avoir quelque chose à prouver, il fut en permanence à couteaux tirés avec ses coéquipiers. Et surtout avec Cyclops, dont il remettait sans cesse les ordres en question (imaginez si Wolverine ET lui étaient restés dans l’équipe, ce pauvre Scott aurait pété les plombs bien plus tôt…). Néanmoins sa mort fut un traumatisme profond pour toute l’équipe, leur rappelant le danger bien réel auquel ils étaient confrontés, et mettant pour la première fois Cyclops face à ses doutes sur ses capacités de leader.
Ainsi, à la manière d’un Tupac Shakur, c’est dans la mort que Thunderbird devint immortel (merci à Michael A. Sheyahshe pour la comparaison). Et son héritage perdura notamment au travers de James Proudstar, son jeune frère.
Empli de rancœur envers ceux qu’il estimait responsables de la mort de son aîné, James s’empara de sa dépouille pour lui rendre les derniers hommages à la manière de son peuple (dans une magnifique Vignette). Puis il rejoignit les Hellions d’Emma Frost sous le nom de Thunderbird pour s’opposer aux X-Men. Il se rendit néanmoins vite compte que le sang ne suffirait pas à noyer son chagrin, et ne put se résoudre à assassiner Charles Xavier.
Hélas pour lui, il n’allait pas encore trouver la paix. De retour dans sa réserve, il découvrit que toute sa tribu avait été massacrée. A nouveau en quête de vengeance, il rejoignit les New Mutants, puis suivit Cable lorsque l’équipe devint X-Force, prenant au passage le nom de Warpath. Il fut un membre régulier de l’équipe pendant de nombreuses années, découvrant au passage que ce n’était pas Emma Frost mais Stryfe qui était à blâmer pour le meurtre des siens.
Sa seconde heure de gloire finit par arriver lorsqu’Ed Brubaker prit en main la destinée des X-Men. Le scénariste incorpora le mutant à son équipe, et en fit le digne pendant de Wolverine (peut-être parce que les éditeurs ne voulaient pas qu’il joue avec l’original, déjà présent dans de multiples séries ? Simple supposition). Bad-ass, dangereux, traqueur et combattant remarquable, il se révéla durant cette courte période. Si bien qu’il fut intégré à la nouvelle mouture d’X-Force mise en place par Cyclops (avec Wolverine, X-23 ou encore Archangel).
C’est au sein de cette joyeuse bande d’assassins (et sous la plume du duo Craig Kyle/Chris Yost) que James put laisser libre court à son côté sombre, mais surtout qu’il finit par trouver la paix à laquelle il aspirait, acceptant sa nature de guerrier mais renonçant à sa colère et ses instincts meurtriers. Et il put surtout faire le deuil de son frère (à l’occasion du crossover Necrosha), dont l’ombre planait encore sur sa vie, avant de quitter l’équipe.
< Chapitre précédentSteeve's CornerChapitre suivant >Reviews ExpressJe l'avais annoncé, ça c'est hélas vérifié, voici le Reviews Express le moins fourni de tous les temps. Un seul titre pour moi (et pas terrible en plus, d'où l'absence de Pick ici. Sinon ce serait Red Team, abordé en Focus). Heureusement que Manu et Crisax ont pu apporter leur écot afin que vous ayez de quoi vous repérer dans les rayons de votre comic shop.
Ecot qui permet entre autre de déceler une belle unanimité de l'équipe autour du gâchis représenté par Thanos Rising, et de la qualité de Young Avengers (premier Pick unanime).
Comme toujour, si vous voulez la primeur de Reviews Express (oui, quand il y en a) vous pouvez nous suivre via Twitter @Jeffzewanderer, @EmmanuelPeudon (Manu), @xSupanx (Crisax) et @SteeveAubert (Steeve quand il aura relâché les otages et présenté sa liste d'exigences).
Semaine du 03/04
Manu
#review ThanosRising 1 quel gâchis de donner des origines si humaines à Thanos. Et la colo gâche une nouvelle fois le trait de Bianchi. 3/5
#review GreenArrow 19 c'est toujours très beau mais après 3 numéros de démontage on attend qu'Ollie reprenne le dessus. Bientôt ? 3,5/5
#review GreenLantern 19 Probablement le seul mag de la ligne à suivre en ce moment, il n'y a que là que ça avance. Excellent Sinestro. 4/5
#review AnimalMan 19 vraiment tragique et preuve que le Red n'est pas le "bon" côté du combat. Un nouveau départ pour le personnage. 4/5
Crisax
#review ThanosRising 1 Le concept même de raconter les origines de Thanos ne me plaît pas. Si c'est bien fait c'est loin d'être original 3/5Semaine du 10/04
Manu
#review GreenLanternCorps 19 sans le retour d'un grand GL, c'est vraiment inintéressant. Pour un dernier event après 6 ans c'est nul ! 2/5
#review FantasticFour 6 un numéro très anecdotique qui me rappelle pourquoi je ne lisais pas les FF jusqu'à Marvel NOW! 2/5
#review Constantine 2 On a beau dire, le "vrai" Constantine va manquer désormais. Ce n'est plus qu'une ombre de l'ancienne version. 2,5/5
#review Avengers 9
Une conclusion à l'arc en cours et au premier arc de la série. Que faire face à
trop de pouvoir ? 4/5
Semaine du 17/04
Jeffzewanderer
#review Cyberforce 4 Assez mal dessiné et basique mais étonnamment plaisant quand on se laisse prendre, surtout pour ce prix (gratos) 3/5
Manu
#review GreenLanternNewGuardians 19 Sortez le Power Rangers noir qu'on en finisse ! 1,5/5
#review DangerGirlTrinity 1 une simple intro mais terriblement sexy et efficace comme à l'accoutumée. Mieux en solo qu'avec les GI Joe 4/5
#review Supergirl 19 ce numéro est plus intéressant pour Power Girl que pour Kara. C'est bon de voir leur rencontre... et le costume ! 4/5
#review TMNT-Villains 1 l'enfance et la montée de Krang. Etonnamment lucide sur lui-même, il nous surprend et devient presque touchant. 4/5
#review JusticeLeague 19 Un rappel de "Tour de Babel", une ingérence de Sup et WW et Shazam excellent. JL a encore un bel avenir. 4/5
#review Nova 3 toujours aussi bon avec un Rocket Raccoon purement excellent, et une introduction de taille dans l'univers 616. 4,5/5
Crisax
#review Nova 3
C'est beau, c'est fun mais c'est quand même bien vide depuis le début, voir
répétitif dans le peu de dialogue qu'il y a 2,5/5
#review AgeOfUltron 6 Ça avance,
enfin! Malheureusement on n'y croit pas vraiment vu ce que l'on sait pour la
suite. 3/5
#review CaptainAmerica 6 Dans la Dimension Z Cap part
chercher Ian. Toujours aussi original et plaisant avec un Romita Jr convaincant 4/5
Semaine du 24/04
Manu
#review UncannyX-Men 5 Il n'y a pas à dire, le départ de Bachalo fait très mal. On voit les déboires de Magik mais ça ne sauve pas tout. 3/5
#review JLDark 19 Meilleur arc que le précédent mais la finition laisse à désirer Fawkes n'est pas Lemire et Cifuentes n'est pas Janin 3,5/5
#review GuardiansOfTheGalaxy 2 C'est beau rythmé et bien dialogué mais il manque un truc sur lequel j'arrive pas à mettre le doigt. 4/5
#review YoungAvengers 4 Tant de génie en 22 pages ça ne devrait pas être possible. Géniale arrivée de Noh-Varr. Punchlines à revendre. 5/5 Manu's pick
Crisax
#review GuardiansOfTheGalaxy
2 On en apprend plus sur la situation diplomatique de la Terre. Du bon pop-corn à
tous niveaux. 4/5
#review Jupiter'sLegacy 1 J'ai pris
pour Quitely et finalement Millar me surprend agréablement avec (apparemment)
du fond. 4/5
#review Avengers 10 Les Vengeurs
mènent l'enquête sur les bombes qui ont touchées la Terre. Un numéro plus
"posé" que les précédents. 4/5
#review NewAvengers 5 Le titre le
plus obscur de Hickman, avec beaucoup de mystères, mais tellement passionnant. 4/5
#review YoungAvengers 4 C'est teenage, c'est intelligent,
c'est beau, c'est classe, c'est drôle. Avec une double page de fou. 5/5
Crisax's Pick
The Quote :
« Even though I haven't been here too long, I'll never forget you. Thanks for putting the Brotherhood in Aryan Brotherhood! » Todd – Todd, The Ugliest Kid on Earth #4/Ken Kristensen
< Chapitre précédentWho Dat ?Chapitre suivant >Eye CandyPeek-a-boo ! (by nokindoflife)
Leo et Mikey sont prêts pour le film de Michael Bay... (by Customfig)
La couverture la plus célèbre de Rolling Stone n'a pas fini d'inspirer (by Mad Mel Madigan)
Et on peut en dire autant de Storm... (by Popsyturvee)
Batgirl is ready to rise too... (by 6aura9)
Et c'est fini pour ce mois-ci. Rendez-vous à la mi-mai pour un premier bilan des titres Avengers nouvelle version et une quantité enfin décente de Reviews Express et Focus. Gardez aussi un oeil sur le Facebook du site pour une annonce concernant Eye Candy...
La première partie de ce dossier ayant été consacrée au moyen et au mobile de la mort d'un personnages, l'heure est désormais venus de s'intéresser à ce qui se passe après...
La mort vous va si bien (2ème partie)
Death Is Just A Feeling
On arrive là au point le plus épineux de toute discussion à propos de la faucheuse et des comics : le caractère éminemment transitoire de cet état. Je l’évoquais en introduction, à peu près tous les personnages majeurs ont eu droit à leur mort supposée définitive et à un retour triomphal. Vous ne me croyez pas ? Allons-y pour un petit inventaire.
Superman ? Death Of Superman, et il s’en est remis. Batman ?Batman RIP puis Return Of Bruce Wayne. Captain America ? Tué par Crossbones dans l’épilogue à Civil War (Captain America #25), revenu dans Captain America Reborn. Cyclops ? Se sacrifie pour vaincre Apocalypse (Uncanny X-Men #378), puis se « dé-sacrifie » grâce à Cable et Jean Grey (Search For Cyclops). Hal Jordan ? Mort pour sauver le monde (Final Night), ressuscité dans Days Of Judgement en tant que Spectre. Thor ? Ragnarok (Thor vol 2 #80-85), puis de retour dans sa nouvelle série. Et on pourrait continuer l’énumération ad nauseam (Flash, Green Arrow, Hawkeye, Iron Man, ¾ desFantastic Four…). A noter, détail surprenant, qu’à ma connaissance Wonder Woman a toujours été épargnée. Elle, on se contente d’annuler sa série.
Bref, la mort on s’en remet très bien. Il semble cependant pertinent d’opérer une distinction au sein de cet ensemble de « morts temporaires » (ou « fausses vraies morts »). Certaines avaient clairement vraiment vocation à être définitives (Flash, Green Lantern, Green Arrow…). Le retour du héros s’est fait plusieurs années plus tard, et sous la houlette de créateurs et d’équipes éditoriales différentes. Mais dans certains cas, le meurtrier et l’artisan de la résurrection sont une seule et même personne (ou un même groupe de personnes). Ce fut le cas pour Captain America, tué et ramené à la vie par Ed Brubaker. Ou de Batman, avec Grant Morrison aux manettes. Brian Bendis a aussi joué avec la vie d’Hawkeye, tué dans Avengers Disassembled et ressuscité dans House Of M.
Dans ces cas, et malgré le délai
parfois important séparant la mort et le retour (plusieurs années parfois), on
peut légitimement supposer que le scénariste avait d’emblée dans l’idée de
ramener sa victime à la vie. On se situerait donc dans le cadre d’une variante
élaborée de la « mort cliffhanger »,
une version poussée à son paroxysme de cette « ficelle ».
No Way Back
La résurrection paraît donc inéluctable pour nos chers défunts. Mais il existe cependant quelques exceptions à cette règle immuable, des morts que nul ne semble décidé à remettre en cause. Les retours de Bucky (sidekick de Cap America revenu en tant que Winter Soldier) et Jason Todd (ex Robin 2 devenu Red Hood), longtemps tabou et finalement survenus, ont mis un sacré coup à cette idée, mais il reste quelques défunts « intouchables ».
On peut les compter sur les doigts d’une main : L’oncle Ben (oncle de Peter Parker aka Spider-Man), Gwen Stacy (feue la petite amie du même Spidey), Thomas et Martha Wayne (parents de Batman),). On peut éventuellement en ajouter un ou deux autres à la marge (la famille Castle (famille du Punisher), les parents de Peter Parker…) mais pas plus.
Premier constat, il ne s’agit pas de héros. Soyons juste, à part Gwen Stacy, ce ne sont même pas des personnages qu’on a vraiment vus dans les séries où ils auraient pu apparaître (on ne voit l’oncle Ben que dans Amazing Fantasy #15, première apparition du tisseur). Mais ce n’est pas là la clé du mystère. Harry Osborn aussi était un second rôle, mais lui a quand même eu droit à sa résurrection. En fait, si ces personnages sont toujours six pieds sous terre, c’est parce que leur mort est un acte fondateur pour le héros qui y est lié.
Sans la mort de ses parents, Batman perd la motivation originelle de sa croisade contre le crime. Son oncle ressuscité, Spidey ne porte plus le poids de la seule fois où il a fui les responsabilités que lui conféraient son grand pouvoir, et c’est l’âme du personnage qu’on perd. La mort de Gwen, c’est la mort de l’innocence (elle prend quasiment une dimension méta-textuelle), le symbole des risques qu’encourent tous ceux qui sont proches de Spidey…
La mort de Captain Marvel premier du nom est quant à elle un cas un peu particulier. Cela car elle fait partie des Classiques non seulement par son côté tragique, mais aussi par sa dimension « réaliste » (il est emporté par un cancer). Une résurrection porterait atteinte à ce dernier point. Mais surtout cette mort est la plus belle heure de gloire du personnage. Il s’agit donc en quelque sorte d’un acte fondateur, sinon du caractère du héros, du moins de son aura, son côté mythique. Bref de ce qui pourrait justifier la tentation de le ressusciter. Donc « annuler » sa mort, c’est aussi nier ce qui justifie justement l’envie de le ressusciter. Et le serpent se mordit la queue…
A noter que l’indifférence relative suscitée par le personnage et sa mort aux yeux des lecteurs peut aussi être une explication plausible, malgré son cynisme. Thunderbird, défunt X-Man tombé lors de sa première mission ne fut jamais ressuscité sinon le temps de l’un ou l’autre crossover (Necrosha, Chaos War) et toujours pour retourner à son repas de pissenlits par la racine. Il faut dire que si ce décès a marqué les X-Men, il n’a cependant pas plus émus les lecteurs que ça, qui n’ont pas eu le temps de s’attacher au personnage ni même de le rendre culte. D’où la pérennité de son décès.
Mais pour en revenir aux exemples précédents, il s’agit donc de cas où ressusciter le personnage viendrait porter atteinte au héros, l’abimer en le privant d’un ressort psychologique essentiel (littéralement, qui touche à son essence). C’est aussi pour ça que Jason Todd et surtout Bucky ont pu être ramenés à la vie : leur mort n’était pas (ou plus) à proprement parler un « acte fondateur ».Comeback Kids
La mort de Bucky a pu être une partie importante de la psychologie de Captain America lors de son « réveil » dans les années 60. Mais depuis elle était devenue un cliché. Cap n’était pas défini par la façon dont il portait son deuil, mais par son héroïsme et sa détermination à toujours faire ce qui est juste. C’est moins vrai pour la mort de Jason Todd, qui se rapprocherait à priori assez de celle de Gwen Stacy pour son côté « symbole des risques encourus ». Mais on pourrait arguer que puisqu’il a repris un sidekick par la suite, Batman a su surmonter cette mort, faire son deuil, et que par conséquent elle avait perdu son caractère d’ « acte fondateur » (alors que Peter Parker continue de garder son identité secrète pour protéger les siens). Ou considérer que Batman a eu bien d’autre raison de réaliser les dangers de son activité pour ses proches (The Killing Joke) et que donc la mort de Jason n’était plus un symbole aussi fort que celle de Gwen.
Ou, de manière plus cynique, on
peut aussi dire que tous ces chers défunts (Gwen, oncle Ben, les Waynes…) ne
risquent pas d’avoir leur série régulière, et que donc ça ne vaut pas la peine
de braver l’ire des fans pour les ressusciter. Ça expliquerait aussi pourquoi
certains personnages restent décédés dans l’indifférence générale, n’est-ce pas Blue Beetle (Ted Kord) et Black Goliath ?
What Is It Good For ?
L’ire des fans justement, étonnamment bien plus terrible lorsqu’on parle de ramener un personnage à la vie que quand on l’envie ad patres. Peut-être est-ce dû au fait que justement la mort donne un caractère noble à un récit (voir plus haut) et que la résurrection viendrait appauvrir cela. Finalement le drame n’en serait plus un. Pire, il deviendrait farce. Et si tout le monde revient tout le temps, comment se sentir impliqué dans une mort ? Ce ne serait plus un ressort dramatique, mais une ficelle grossière.
Mais est-ce si grave ? Une résurrection porte-t-elle toujours atteinte à la mort qui l’a précédée ? Pas forcément. Tuer un personnage ne doit pas être une ficelle. Si on le fait, cela doit faire partie intégrante de l’histoire, venir naturellement et avoir un sens. Et dans ces cas qu’en a-t-on à faire si dans six mois ou un an le personnage revient ? La mort de Colossus, se sacrifiant pour éradiquer le virus Legacy en hommage à sa sœur défunte, est-elle une moins bonne histoire depuis que Joss Whedon l’a ramené à la vie ? Ragnarok est-elle devenue une saga moins poignante depuis que Joe Strazscynski à relancé la série Thor ? Assurément pas. Une bonne histoire reste une bonne histoire en elle-même, pas pour ses retombées. Ou alors il faut retirer à The Killing Joke ses galons de classique depuis que Barbara Gordon remarche.
En fait le vrai problème, ce n’est pas la résurrection, c’est quand la mort est mauvaise, voire qu’elle devient une figure imposée. Il semble en effet y avoir chez les scénaristes une propension critiquable à toujours vouloir avoir au moins un mort par gros event histoire d’être pris au sérieux. L’exemple récent le plus infâme fut sans doute la « mort » de Thor à la fin de Fear Itself, des plus gratuites et peu crédibles. A croire qu’on ne peut pas raconter une bonne histoire sans tuer quelqu’un. Et puis une résurrection, même si elle est bancale (Jason Todd, ramené à la vie par une crise de nerfs de Superboy Prime frappant les « murs de la réalité » ou je ne sais plus trop quoi…) ouvre la porte à de bonnes histoires dans l’avenir. Alors que la mort prive les créateurs d’un jouet parfois génial.
Bon ce dernier point est quand même à tempérer. D’une part parce qu’une mort peut donner lieu à de bonnes histoires aussi au-delà du seul numéro où elle se produit (la mort de Cap America par exemple donna lieu aux one-shots Fallen Son, plutôt réussis). Mais surtout, même si je veux bien ne pas être trop regardant sur la façon dont un personnage est ramené à la vie, préférant me focaliser sur l’avenir, il y a des limites.
Tuer et ressusciter des
personnages est devenu si commun que maintenant certains auteurs ne prennent
même plus la peine de bricoler un prétexte. Ainsi Starlord et une bonne partie des Guardians Of The Galaxy étaient morts dans The Thanos Imperative avant de réapparaître dans Avengers Assemble. Et en guise
d’explication on a un regard narquois de
Starlord à travers le quatrième mur. Ce n’est pas que je ne me réjouisse pas de
leur retour, mais là on est face à une grosse faiblesse de la narration qui
pourrait devenir vraiment gênante si elle devait se généraliser. Que tout ne
soit pas vraisemblable soit, mais pas au point que ce soit du n’importe quoi
totalement incohérent. Les comics ne doivent pas devenir du mauvais Tex Avery ! Alors messieurs les
auteurs et éditeurs, tuez et ressuscitez tant que vous voulez, mais ne nous
prenez pas non plus pour des billes au-delà du raisonnable…