En 2017, nous découvrirons une troisième version des aventures du tisseur sur grand écran. Mais avant d'être l'un des projets les plus attendus de Marvel Studios, Spider-Man était encore un doux rêve pour tous ceux qui voulaient le voir adapté dans les salles obscures. Retour à une époque ou James Cameron, pas encore occupé par les multiples suites d'Avatar, pouvait poser ses griffes sur l'un des matériaux les plus sacrés de la maison des idées.
Nous sommes dans les années 1990, drôle de période pour les films de super-héros, qui connaissent leurs premiers émois modernes avec le succès des films Batman de Tim Burton. Normal que beaucoup de boîtes de production s'intéressent alors à Spider-Man, qui se retrouve pris dans un flou juridique assez taré du côté du cinéma. Plusieurs entreprises vont ainsi se passer les droits d'adaptation du héros : Cannon Films, Carolco Pictures puis Colombia Pictures.
Et à cette époque, je ne vous apprend rien, le genre super-héroïque n'en est même pas à ses balbutiements, ce qui implique que des réalisateurs tout à fait inconnus ou complètement underground se retrouvent attachés au projet Spider-Man. Pour le tisseur, les nineties sont donc une période trouble qui le voit être réinterprété par des réalisateurs d'horreur (on pourrait y voir les prémices de Sam Raimi, et maintenant Jon Watts) ou de films de Chuck Norris, jusqu'à ce que James Cameron, a priori passionné par le héros (celui de son enfance), rédige un papier qui pourrait servir de premier jet pour le scénario d'un film Spider-Man.
Quand il écrit cette note d'intention de quarante-sept pages, qui mélange des passages entièrement scénarisés et une narration plus classique, le réalisateur est alors en pleine ascension, tout juste sorti de la réalisation de Terminator 2 : Judgment Day et en préparation de sa comédie culte, True Lies. Il n'est pourtant pas le premier à s'attaquer au mythe du tisseur, puisqu'il reprend le flambeau de Leslie Stevens (The Outer Limits), qui avait imaginé un Peter Parker poilu et doté de huit bras - pour l'anecdote, le scénario avait choqué Stan Lee, qui l'avait botté en touche - et du duo Ted Newsom/Jon Brancato, qui liaient la genèse de Peter Parker à celle de Doc Ock, les deux étant impliqués dans la fameuse morsure de l'araignée radioactive. Et le moins qu'on puisse dire c'est que cette version n'était pas plus brillante que la précédente, puisqu'elle plaçait la catch phrase "okey-dokey" dans la bouche de Doc Ock.
James Cameron ne fera guère preuve de plus de fidélité au personnage, en changeant le nom de nombreux personnages, comme Flash Thompson qui se voit rebaptisé Nathan McCreery, sans doute d'après l'un des anciens camarades du réalisateur. Pire, il transforme le malaise social de Peter Parker en une haine du moderne (ce qui équivaut à faire de ce personnage progressiste un conservateur, tout de même) et il tire un trait sur le fameux adage "un grand pouvoir implique de grandes responsabilités". Restent au programme un Spidey flirtant avec Mary Jane (nous y reviendrons) et cognant des vilains. En l'occurrence, Cameron s'intéresse au cas d'Electro et Sandman, tous les deux dotés de nouvelles identités civiles, même si plusieurs rumeurs font état d'un Docteur Octopus qui aurait pu être incarné par la muse du réalisateur, Arnold Shwarzenegger.
Vous avez déjà assez ? Attendez la suite ! Si James Cameron a le mérite, dans son papier, de s'intéresser de près à la relation qui unit Peter à MJ, son approche est au moins aussi bancale que celle de Rami sur le sujet. On pourrait même la juger déplacée, puisque ce bon Peter s'amuse à utiliser ses pouvoirs pour mater Mary Jane quand elle se déshabille, et finit par l'attacher avec sa toile dans une scène de sexe qui préfigure l'érotisme de Titanic en initiant le spectateur au bondage.
En 2015, rien de très choquant, mais James Cameron avait assurément pris trop à cœur le côté creepy de Peter Parker. Non pas que l'approche hipster du personnage de Marc Webb et de ses deux films soit plus fidèle, mais il aurait sans doute été difficile de ressentir de la sympathie pour cet adolescent réac'. Or c'est la puissante identification des lecteurs à ce jeune personnage qui a toujours fait le sel d'une bonne histoire de Spider-Man. Mais nous connaissons ce bon Jim, il s'amuse souvent à écrire des personnages "faibles" pour mieux transcender leur condition par la suite, en témoigne une Sarah Connor transformé d'un Terminator à l'autre. Pas sûr que nous aurions survécu à un premier métrage cependant, surtout qu'à l'époque, il avait été budgété à 10 millions de dollars, soit 20 fois moins, à peu de chose près, que ce qui sera donné à Jon Watts d'ici quelques mois.
Pour ceux que ça intéresse, des fans ont mis en images le papier de James Cameron, que vous pouvez retrouver ici.