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Édito #49 : l'identité du Joker est-elle le plus précieux des secrets ?

Édito #49 : l'identité du Joker est-elle le plus précieux des secrets ?

chronique

Cet édito contient quelques spoilers sur DC Comics en V.O.
Rien de bien méchant, mais vous êtes prévenus. 


À l'heure où des légions de fans s'affrontent pour savoir si Jared Leto sera à la hauteur de ses trois prédécesseurs dans la peau d'un Joker que l'on annonce psychopathe à souhait (bien loin de la version gangster de Jack Nicholson ou du chaotique Heath Ledger), DC Comics nous offre de la folie sur tous les fronts.

Avec Arkham Knight, déjà, où le nemesis de Batman fait son énième retour pour une dernière virée dans Gotham à travers son hôte et meilleur ennemi, en comics ensuite, où une page très importante de son histoire vient peut-être de s'écrire. En effet, bien loin des polémiques stériles qui entourent l'héritage bafoué de ce chef d'oeuvre de The Killing Joke en couverture ou ailleurs, Geoff Johns a offert des pouvoirs divins à Bruce Wayne, devenu dans Justice League #42 le dieu du savoir. Et quelles questions hantent l'esprit du milliardaire au moment d'accéder à la connaissance totale ? L'identité du tueur de ses parents, Joe Chill (qui lui sert à tester la viabilité du divin trône), mais aussi celle beaucoup plus controversée de son plus grand adversaire : le nom civil qui se cache derrière le sourire le plus iconique des Comics. "No, it's impossible" nous déclare alors un Batman désabusé, à priori choqué par sa découverte.

Madness, as you know, is like gravity. All it takes is a little push.

Se posent alors plusieurs questions :

• Qui est-il ?
• Est-ce un énième effet de manche pour chatouiller les sentiments des fans ?
• Geoff Johns a-t-il (encore) une idée derrière la tête ?
• Était-ce bien utile d'en arriver là pour relancer l'intérêt des lecteurs ? 
• Mais, il était pas disparu (voire mort) depuis Scott Snyder, ce Joker ?
 
 
Représentation graphique du chaos, le Joker n'est que l'autre face de la pièce Batman, la réponse à l'existence même du Chevalier Noir de Gotham, né sur les cendres des croisades de l'Homme Chauve-Souris pour mieux faire trembler ce dernier dans sa quête de justice. Absolu dans son concept, le Joker se passe aisément d'origines, allant même jusqu'à rendre celles-ci taboues pour des millions de fans résolus à l'idée que ce dernier n'est que la représentation la plus pure du mal, sorte de prophète démoniaque venu répandre la violence et la mort pour son plaisir le plus jouissif, au-delà de l'aspect purement karmique de ses actions en réponse à celles de Batman
 
Pourtant, il faut bien garder à l'esprit qu'il y a autant de Jokers que de talents pour les interpréter et de lecteurs pour l'imaginer, à tel point que le personnage glisse tel un troll du fond des âges sur la vérité. Votre interprétation de Big J ne sera pas la même que votre voisin fan de Bruce Timm et de l'interprétation de Mark Hamill, qui ne sera pas la même que celle de votre cousine, amoureuse transie du regretté Heath Ledger. Ceci dit, la question de savoir si donner une origine au Joker est toujours un crime contre le fandom reste en suspens. Celle-ci, Scott Snyder, dernier auteur à s'être attaqué au personnage, l'a bien évitée lors de Death of the Family et Endgame, les deux derniers duels entre Batman et le bourreau de Barbara Gordon.
 

Well, you look nervous. Is it the scars ? You want to know how I got 'em ?

Cette question, le cinéma se l'est posé à plusieurs reprises. D'abord avec Tim Burton et sa version très personnelle du vilain qui emprunte beaucoup à Alan Moore qui, on le rappelle, ne voyait pas d'inconvénient particulier au fait de donner un passé au Joker, si tant est que le barbu le plus aigri de l'industrie jouait à la perfection avec l'aspect nébuleux qui entoure cette petite frappe devenue le plus grand vilain de tous les temps après un tour dans un bain acide un jour de casse raté. Chris Nolan, dans The Dark Knight, embrassera la légende urbaine qui entoure le personnage, jouant notamment sur le tableau d'une Amérique post-11/9 et de ce qu'on pourrait imaginer être un ex-soldat de l'US Army, bien loin de ses lignes de dialogues invoquant tour à tour son père ou sa femme pour mieux faire éclater les fragments de vérité. 
 
Voici qui nous amène à Jared Leto, quatrième et nouvel interprète du Joker sur les écrans, plus psychopathe et "damaged" que jamais. Et alors que Geoff Johns s'amuse à jouer avec le feu en Comics, une théorie vient de faire le tour de la toile plus vite qu'une Batmobile lancée à pleine vitesse. Ainsi, dans l'univers où Batman est en poste depuis 20 ans sous les traits de Ben Affleck, le Joker aurait déjà mis un terme à la vie de Robin, dont l'identité civile (un comble) serait Dick Grayson. Pas de Jason Todd terminé à coups de barre de fer donc, et c'est là que tout vrille. En effet, un fan a imaginé un monde dans lequel ce Joker serait en fait Jason Todd lui-même (les personnages étant intimement liés par leur passé commun, ainsi que par l'amour des gros casques rouges), héritier mental d'un Joker originel disparu (des mains de Batman?) et bien décidé à faire régner la terreur sur Gotham et dans la tête d'Harleen Quinzel. Cette affiliation s'expliquerait par le tatouage de plume sur son bras, au même titre que le "J" tatoué sur son visage. Un J comme Jason, mais aussi comme Joker. Attention à ne pas se faire emmener par une fan-fiction sexy donc, malgré notre envie de crier au génie devant cette idée.
 

Why so serious ?

Petite frappe, voleur endetté ou simple anarchiste sans passé, telles sont les différentes identités revêtues par le Joker ces dernières décennies. Et si la question de savoir si celui-ci peut posséder une identité secrète tout en étant conscient de celle de Batman choque de nombreux lecteurs obtus, il est maintenant question de savoir si Geoff Johns ira au bout de son idée et nous offrira une origine tout ce qu'il y a de plus pragmatique pour un personnage qui dépasse largement le cadre de la Bande Dessinée pour le concept qu'il représente. Et au-delà même de l'effet de manche, on est aujourd'hui en droit de se demander quelle est l'utilité d'une telle idée, passée le sacro-saint quotient de spectacularité. À voir maintenant si, à l'image d'Alan Moore, l'auteur phare de DC Comics aura suffisamment de talent pour nous faire accepter l'existence d'un passé, celui d'un personnage de toute façon appelé à ne regarder que vers l'avant. 
 
Sullivan
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