Pour sa nouvelle série chez Image, Brian K. Vaughan (Saga) s'associe à Steve Skroce (Amazing Spider-Man). Deux artistes canadiens qui vont donner naissance à un conflit fictif entre les Etats-Unis et le pays à la feuille d'érable. Un récit guerrier et prometteur, en forme de métaphore exacerbée des relations unissant les deux grandes nations de l'Amérique du Nord.
Si vous mangez cinq œuvres de culture populaire par jour, vous savez que le Canada et les Etats-Unis sont loin de toujours s'entendre. Et si cette rivalité prend le plus souvent la forme de moqueries, sur le Hockey, le français québecois et j'en passe, cette approche semblait trop douce pour l'auteur de Saga, qui a décidé de mettre sur pied un futur dystopique qui voit le Canada ravagé par les frappes militaires de l'Oncle Sam après une supposée attaque sur la Maison Blanche. Un pitch et un univers qui forcent l'auteur à troquer le style subtil de Saga pour une approche plus directe de son sujet, tout un gardant un œil très mature - sang et tripes sont au rendez-vous - sur ce dernier.
Assez surprenant de prime abord, ce style correspond finalement assez bien à l'histoire, et permet à K.Vaughan de conjuguer son talent à une narration typique de la science-fiction militaire, qui ne perd pas une seule case à exposer son contexte : en quelques pages seulement, le scénariste nous offre le minium syndical, ce qui n'est pas pour nous déplaire, puisque la lecture devient alors intuitive et efficace. Nous voilà pris dans les aventures d'une jeune résistance canadienne, qui après avoir survécu seule dans la forêt, tombe sur le dernier groupe de guérilleros local, le Two-Four. Une équipe haute en couleur, boostée par une diversité qu'on sait chère au cœur de l'auteur. L'intrigue se prend donc assez vite en main, et elle nous emmène sans aucune concession dans cette atmosphère guerrière.
Côtés dessins, le constat est presque le même. Steve Skorce, qui a travaillé sur Spider-Man, Cable ou Gambit avant de partir du côté d'Hollywood (et des storyboards des films des Wachowski, qu'il réalise encore aujourd'hui) revient instinctivement à ses premiers amours. K.Vaughan vient de relancer un des talents (pas si) cachés de l'industrie, pour notre plus grand plaisir. Le style de l'artiste, plutôt détaillé, ne plaira pas à tous, mais les concepts et autres designs qu'il livre dans ce premier numéro risquent de marquer le lecteur. On sent l'influence du cinéma dans la composition des planches (quelques références sont au rendez-vous, d'ailleurs) et le look des engins américains, qui ne sont pas sans rappeler le travail de Bethesda sur Wolfenstein : The New Order.
Une équipe créative plutôt au top donc, mais il nous faudra visiblement plus d'un numéro pour juger définitivement de l'intérêt de We Stand on Guard. En effet, si la quasi-absence d'exposition et de contexte est appréciable, elle rend le propos de cette série encore un peu flou. Mais connaissant Brian K.Vaughan, on imagine que l'auteur canadien ne se contentera pas d'un simple fantasme patriote. Quelques pistes de réflexions pointent déjà le bout de leur nez d'ailleurs, et on espère que cette histoire de science-fiction militaire - qui ravira assurément les fans du genre - déploiera son plein potentiel au fil des numéros.
Il est encore trop tôt pour juger la série We Stand on Guard. Mais au regard de ce premier numéro, le nouveau titre d'Image, qui réunit deux légendes de l'industrie, pourrait rapidement transformer l'essai dans les bacs des comics shops pour les mois qui arrivent. De la S.F guerrière et bien conçue, qui cache sans doute tout un horizon réflexif insoupçonné !
