Alors que Panini Comics vient de lancer Secret Wars en France, dans une nouvelle ligne kiosque créée pour l’occasion, Marvel et Jonathan Hickman mettent (enfin) cette semaine un terme à l’event qui aura marqué 2015, avec quelques mois de retard. On nous avait promis que le retard de ce dernier numéro, suivi du lancement d'All-New All-Different Marvel, ne gâcherait pas la fin de l’event. Et pour une fois, ce ne fut pas qu’une promesse éditoriale, malgré un ou deux éléments déjà entrevus dans le relaunch.
On savait donc déjà à quoi ressemblait l’univers Marvel après Secret Wars, et le nouveau statu quo de certains personnages semblaient établi. Mais c’était sans compter sur la puissance narrative et émotionnelle du dernier numéro de Jonathan Hickman, celui d'un run débuté il y a plus de six ans.
Car s’il est vendu comme un event presque classique, Secret Wars était avant tout la conclusion ultime au "run Vengeur" de Jonathan Hickman chez Marvel, et à l’histoire qu’il avait commencée en 2009 dans Fantastic Four. Ainsi, Secret Wars n’a pas la prétention de plaire à tout le monde. Le crossover ne fut pas formaté comme un event habituel, de ceux qui ont pour but d’attirer le plus de lecteurs possibles, et donc l’attention, pour finir par décevoir presque tout le monde. Non, Secret Wars et Jonathan Hickman visent un public beaucoup plus limité, les fans de ce qu’a construit Hickman jusqu’ici chez Marvel, et parvient à ne pas les décevoir.
L’event aura donné son lot d’action, principalement grâce à la légion de tie-in sur le Battleworld, mais sa conclusion se sera faite de façon musclée mais beaucoup plus intime qu’on aurait pu le craindre, et vient conclure à la fois l’histoire de Reed Richards et Doom (Fatalis), ainsi que l’univers que les Fantastic Four auront lancé.
« Is it playing God if you’re truly serious about creation? No. It’s not. […] You think I don’t have to do this? I do. We need to burn it down and start over. Gods make mistakes. Richards – look at us »
Ces mots, qu’on pourrait imaginer tout droit sortis de Secret Wars, sont en fait ceux prononcés par Bentley Wittman, The Wizzard (le Sorcier), à Reed Richards dans le premier arc de Jonathan Hickman sur la série, il y a plus de six ans. Ils trouvent aujourd’hui écho dans la confrontation de Reed Richards avec Doom, et dans sa conclusion, qui tombe de façon logique tout en étant surprenante, et qui vient clore une histoire vieille de plusieurs décennies. La caractérisation des personnages aura été maitrisée de bout en bout.
À une époque où les rumeurs veulent que Marvel enterre ses Fantastic Four pour embêter la FOX, Jonathan Hickman se paye le luxe de nous raconter l’une de leur plus grande histoire, en la dissimulant derrière la couverture d’un blockbuster. Et au passage, il rend à la première famille de Marvel sa place en tant que principal pilier de l’Univers Marvel.
À cela, Jonathan Hickman et Esad Ribic prennent le temps de mettre en place les pierres fondatrices du nouvel univers Marvel, et lancent quelques intrigues qui viennent mettre en lumière la nouvelle direction de ces personnages clés. Personnages, qui ne sont pas sans nous rappeler l’avenir de la franchise Marvel Studios, mais dans des positions qui vont à l'encontre de leur approche au cinéma. Réussir une histoire personnelle tout en faisant avec les probables contraintes éditoriales, il aura fait fort Jonathan, nous rappelant le talent qu’à Jason Aaron sur ses propres séries pour faire de même. De quoi pardonner les quelques mois de retard du titre.
D’ailleurs, pour mentionner la partie graphique d’Esad Ribic, elle est globalement dans ce qu’on a pu voir de lui sur l’event, agrémentée de plusieurs pages magnifiques, dans lesquelles Ribic s’amuse avec l’opposition Richards / Doom, et une conclusion du numéro qui vous renversera le cœur.
Au final, Secret Wars aura réussi à surprendre, à ne pas décevoir, et à émouvoir ceux qui l’attendaient le plus. La contrepartie négative est que ceux qui sont plutôt hostiles de base au travail de Hickman chez Marvel resteront froids à cet event. Et on sent déjà que Marvel, avec son relaunch, diverges déjà de certains principes mis en place par Hickman. Ça nous rappelle quelque chose…
PS : Pour les lecteurs VO et ceux qui aiment les spoilers, je vais publier ce soir un article expliquant les conséquences de Secret Wars sur l'univers Marvel aujourd'hui, les pistes qu'il lance, et ce que Marvel commence déjà à enfreindre dans ses nouvelles séries. Stay tuned.