Il est presque un catalogue à lui seul au sein de celui d'Image, Rick Remender revenait cette semaine dans les comics shops avec un nouveau titre intitulé Seven To Eternity. Surprise : l'auteur y abandonne ici sa chère Science-Fiction - le genre qu'il avait choisi pour la plupart de ses œuvres récentes - pour la Fantasy. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que l'essai est transformé, grâce à un univers déjà addictif et des planches signés Jerome Opeña, plus en forme que jamais. Petit retour sur ce premier numéro déjà disponible chez Image Comics.
Dans les 37 pages qui le composent, Remender nous emmène à la rencontre d'Adam, le fils d'un homme qui n'a jamais voulu se soumettre à un maître du monde des plus persuasifs, qu'on appelle le Mud King ou encore The God of Whispers. Mais notre héros n'est jamais que l'un des membres de la famille Osidis, qui cherche à fuir les guerres provoquées par ce terrifiant antagoniste, jusqu'au jour où l'un de ses lieutenants finit par tous les rattraper. C'est ici que débute notre histoire, celle d'une saga familiale, une approche que les fans de Fantasy connaissent bien, tout comme les amoureux de la bibliographie de Remender, qui fait de la dynamique familiale un vrai moteur de l'intrigue. Une nouvelle fois. On le comprend d'ailleurs dès la première page, en prose, qui nous introduit aux choix d'un père et aux dettes d'un fils. Bref, si vous allez lu Black Science ou encore Low, vous êtes en terrain connu.
Et puisque l'auteur s'en tire toujours très bien dans son écriture de familles hautes en couleurs, lui qui est papa de deux enfants, on ne peut pas tellement lui en vouloir. Seulement, on aura une pensée pour ceux qui comme nous suivent tous les écrits de Remender, qui risquent de ressentir une certaine lassitude ici, ou envers ceux qui ne les apprécient guère, et qui ne trouveront pas, dans ce premier numéro, un auteur débarrassé de ses thèmes fétiches. On notera d'ailleurs que pour le moment, la famille présentée n'a pas autant de charme que celle de Grant dans Black Science ou de Stel dans Low, justement. Il faut dire qu'on a à peine le temps de faire connaissance avec eux dans ce premier numéro qui, dès ses premières pages, nous abreuve d'une grande quantité d'informations.
Si les lecteurs les moins concentrés ou les moins versés dans le genre risquent d'être un petit peu déboussolés dans cette introduction, tous devraient trouver du plaisir dans la découverte du monde de Zhal, le contexte de notre histoire. On sent que Remender a pensé à tout - ou presque - et qu'il s'amuse à distiller des informations sur ce nouvel univers dans les dialogues ou dans les détails des superbes pages de Jerome Opeña. Le tout, avec une énergie qui manquait peut-être à son titre le plus récent, Tokyo Ghost, dans lequel on retrouvait nombre des obsessions de l'auteur. Pas de doute possible donc, la Fantasy fait un bien fou à Remender, et au lecteur, qui profitera ici d'une ambiance qui diffère des royaumes de Westeros ou des histoires de La Terre du Milieu : l'univers s'approche ainsi plus volontiers des créations du génial et regretté Jean Giraud, et lors de certains passages, de la folie créatrice d'un Alejandro Jodorowsky. Et Remender n'a pas invoqué ces noms à la légère.
Mais c'est peut-être Jerome Opeña qui digère le mieux l'art des deux auteurs. Qu'on se le dise, le dessinateur - qui a déjà travaillé avec Remender sur un Fear Agent devenu culte et qui aurait un temps dû se charger de Black Science - est bouillant, et donne au titre une patte assez singulière, d'emblée. Et si on nous parle de Gobelins, de magie ou d'esprits, on les retrouve dans des planches parfaitement composées et assez envoutantes, notamment grâce aux couleurs de Matt Hollingsworth, qui ajoute un je-ne-sais-quoi d'étrange au coup de crayon d'Opeña. Le résultat est en tous cas un vrai plaisir pour nos yeux, qui profitent de superbes cases évoquant, tour à tour, des classiques comme Conan ou d'autres réinventions comme La Tour Sombre de Stephen King.
Vous l'aurez compris, Seven To Eternity est l'immanquable de la semaine et peut-être bien du mois. S'il faudra attendre de nouveaux numéros pour mieux s'attacher à des personnages pour l'instant très ou plutôt trop typiques des écrits de Remender, les planches de Jerome Opeña sont magnifiques, et l'univers nous appelle déjà, comme le ferait le vilain de cette histoire, The God of Whispers, qui a lui seul, est une vraie attraction au sein de ce numéro. On à hâte de continuer notre odyssée dans le monde de Zhal, qui semble relancer une collaboration qui a déjà fait ses preuves sur de bons, voire très bons rails.