Frank Castle débarque en série et en kiosques cette semaine. La série ? Une reprise du concept traditionnel, pas inintéressante. Le comics ? On s'éloigne des sentiers battus. Le Punisher ne se suffit désormais plus à de bêtes malfrats urbains, et quitte son antre du street level pour rejoindre une pan géopolitique intrigant. Un peu à la façon dont Venom aura dégainé les glocks sous Remender, le Big Bad tueur de vilains s'envole dans le corps métallique de War Machine briser une dictature d'Europe de l'Est - et c'est bien.
Le numéro s'ouvre sur un extrait classique de la vie du Punisher, un jour banal, un cartel de plus. La scène est joliment exécutée, le rythme solide du récit s'accompagne d'un trait et de couleurs assez parfaites, où les yeux exorbités de vilains sous le feu de Castle est criant d'expressivité. Un côté authentique traverse les dialogues, par des petits détails comme le besoin d'humaniser les victimes de cette folie vengeresse, en les nommant. On dit adieu à Serge et André, victimes malencontreuses du célèbre porteur de flingues.
Les dialogues font généralement la force du numéro. Bien sentis, bien rythmés, l'auteur triche avec l'exposition en tournant les phrases avec talent, pour coller au caractère fort de Castle et Fury, lequel est d'ailleurs lui-aussi assez parfait dans son esthétique et ses sourires vicelards. Problème, on ressent un effet dans le texte qui fait parfois forcé, et le numéro manque généralement de subtilité. En particulier dans la façon (très facile) dont le Punisher va récupérer la combi' Iron Patriot, jamais arme de destruction massive n'aura été si mal gardée. Dommage.
En dehors de ça, on trouve peu de choses à redire : les découpages sont intelligents, et jouent sur les expressions faciales des héros avec une dose bienvenue d'exagéré, la narration avance au rythme des répliques bien placées ou des quelques moments de silence, et l'action bourrue qu'on attend d'une série Punisher est forte, sans concessions. En fait le numéro a assez peu de défauts, on est pris par la main vers ce nouveau concept qui s'annonce prometteur, des personnages à grande gueule qui interagissent avec un dosage réussi entre l'utile et le stylisé - en définitive, un nouveau bel essai sur le personnage qui continue de ne pas décevoir avec les années.
Evidemment, la seule critique à adresser serait de ne pas chercher à verser dans le sentiment ou l'humanisation du héros. Mais, on a de l'autre côté de la table un Garth Ennis en forme qui s'attache au récit d'un Frank Castle plus humain, et ce retour sous l'égide de Legacy se présente comme un bon complément. On aime, exception faire du back-up d'usage associé à tous les numéros du relaunch, comme d'habitude, vraiment inutile.
A noter d'ailleurs l'audace de Marvel qui aura évité le piège d'être trop proche de sa série TV. Un gimmick de ces dernières années, devenu d'abord lassant avant d'être franchement outrancier, aura été de lier l'agenda des publications à celui des versions adaptées. Si on peut en dire autant de la proximité calendaire séparant le bon Jon Bernthal du Punisher de papier, force est de le dire, les deux n'ont rien à voir et c'est tant mieux. Le concept inédit sur lequel s'aventure le scénario a aussi pour lui d'éviter la facilité du "retour à l'ancienne" promis par Legacy en cherchant à innover. Une bonne lecture, largement conseillée.