DC Comics aime décidément les créations d'Alan Moore. On aura appris récemment le retour, cette fois en continuité, d'une des créations de l'auteur aux mille et un pouvoirs, Tom Strong, sous la plume de Jeff Lemire, auteur d'une nouvelle série Terrifics qui verra se former une équipe de fan favorites disparu.
C'est aujourd'hui au tour du monde de Promethea, autre création de Moore sur son imprint indépendant, ABC Comics, de rejoindre le canon. Lancé avec l'excellent J.H. Williams III en 1999, cette série centrée sur la magie présentait une jeune héroïne, Sophie Bangs, se retrouvant pourvue des pouvoirs d'un personnage capital dans le folklore de ce monde fictif, Promethea, messagère de l'apocalypse. Le personnage fera son arrivée dans JLA #24, portant assistance aux héros de la League après leur défaite face à une certaine Queen of Fables.
Là où DC Comics exerce ici en toute légalité son droit d'utiliser les créations de Moore à sa guise (l'éditeur aura racheté ABC en intégrant WildStorm dans ses publications - et en définitive, Promethea n'est jamais que l'énième intégration de séries basées sur ces univers, comme Midnighter ou Stormwatch auparavant), Williams, co-auteur, aura répondu avec une certaine amertume à cette annonce à mots couverts.
"Donc, ceci se fait sans que je n'ai eu la dignité de l'apprendre par des voix officielles. Je n'en ai pas parlé à Alan, je doute qu'il ait été prévenu également, jusqu'à aujourd'hui. Au-delà d'avoir été prévenu, je ne peux pas en mon âme et conscience approuver que cela se fasse, sous quelque forme que ce soit."
Au-delà de
Promethea en elle-même, c'est une nouvelle fois le débat de la possession et du droit d'auteur qui est ici en jeu. Là où le public semble adouber l'appropriation des héros de
Watchmen devant le silence d'un
Moore lassé de cette boucle sans fin,
Williams en profite pour rappeler sur les réseaux sociaux
la fin plus ou moins explicitement claire de ses relations avec
DC Comics, à l'exception du projet
Sandman Overture d'il y a quelques années.
Difficile d'expliquer ici la démarche de l'éditeur - à l'inverse de Watchmen, le personnage de Promethea ne profite pas d'une popularité immense qui mériterait de créer l'événement autour de cette intégration au canon. On remarque d'ailleurs que le procédé opère dans le feutré, sans annonce tonitruante et au détour de simples sollicitations.
Là où les auteurs de JLA auraient pu s'inspirer de l'héroïne pour leur arc et créer un nouveau personnage - ou contacter Williams directement - DC prend le risque de se brouiller une nouvelle fois avec les auteurs de l'industrie, généralement solidaires dès que l'on porte atteinte à leurs créations. L'éditeur semble apparemment trouver plus intéressant de faire s'affronter Manhattan et Superman, le soutien des lecteurs dans les ventes étant apparemment le seul réel enjeu.