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Punisher #1 : le Big Bad Pun part en guerre

Punisher #1 : le Big Bad Pun part en guerre

ReviewMarvel
On a aimé• Des intérieurs généreux et bien mis en scène
• Punisher sans concessions
• La suite logique du combat de Frank contre l'Hydra
• Rythmé et efficace
On a moins aimé• Matthew Rosenberg se répète
• Les limites de la violence gratuite
• Un abus sur les flous numériques désagréable à l'oeil
Notre note

Passé la superbe couverture de Greg Smallwood, le relaunch du Punisher se place dans la droite lignée du volume précédent. Depuis que Marvel a opté pour le système de la double numérotation, difficile de s'émerveiller sur la perspective de numéros #1 qui assument désormais d'être de simples suites - ici, l'apposition du sigle n'est justifiée que par le changement de dessinateur, et le fait que Castle ait rendu l'armure de War Machine des deux arcs précédents.

Quelques mois après la fin de ce bref passage dans le costume du colonel James Rhodes, le héros-serial killer reprend son infatigable quête de rédemption par la violence. Éliminer Hydra, mener la chasse au Baron Zemo, une manière de dédouaner a posteriori le personnage de sa participation malsaine à Secret Empire. Rien ne dit cependant que Castle aura trouvé la lumière entre temps, puisque le Punisher reste sous la plume de Matthew Rosenberg le salaud ultra-violent qu'il a toujours été - avec des variations qui échappent en l'occurrence au scénariste actuel.
 

 
Zemo continue donc son projet de fédération, en soudoyant ou menaçant différentes nations pour obtenir des votes, en vue de la fondation d'une nation officielle dont la vocation serait d'accueillir l'Hydra. Avec d'autres plans en tête, le terroriste suprématiste et son masque façon Cigares du Pharaon est rattrapé par le Punisher, qui défouraille à tout va dans un numéro gorgé de violence où le héros prononce à peine une petite réplique. 
 
L'ensemble est joliment dessiné et mis en scène par Szymon Kudranski, qui aura très bien compris les effets recherchés par Rosenberg et sa dynamique très ancrée sur l'action. On retrouve de très jolies scènes, des placements de cases, des découpages qui font varier le rythme et une alchimie avec les couleurs assez parfaite dans l'ensemble. Seul les flous numériques de certaines cases entachent l'ensemble, associés à des personnages souvent maniérés dans leur gestuelle au point de devenir étranges dans leurs postures trop expressifs dans leur aspect figé. 
 
Rien de dérangeant sur le papier néanmoins, le numéro demeurant assez superbe dans l'ensemble et dans la continuité de ce que Rosenberg aura proposé sur ce début de run en terme d'iconographie sur les fusillades, l'aspect tout-puissant de Castle et son idée de la géopolitique. Qui reste, comme tout ce que propose le scénariste dès qu'il se met à écrire pour le Punisher, un truc de bourrins sadiques assez violents. 
 

 
C'est un peu le problème. Ce numéro #1 n'a rien d'un numéro #1, et au-delà de la question éthique de cette numérotation arbitraire, le fait est que ce que l'arc World War Frank qui s'ouvre ici est en réalité le troisième servi par ce même scénariste. On commence donc à comprendre ses tics et manies d'écriture et sa vision d'une intrigue satisfaisante. Le fait est que malgré ses qualités de storyteller explosif, Rosenberg confond série défouloir qui s'assume et série bien écrite. Factuellement, son Punisher est pour le moment très répétitif : une série de conflits violents où le personnage triomphe invariablement à la fin.
 
L'arc War Machine était structuré ainsi - avec un début assez proche de ce premier numéro en terme de mise en scène. Frank Castle se donne une mission, va d'un point A à un point B, traqué par ses opposants. Il va évidemment s'en sortir par sa ruse, son instinct et sa capacité à être plus sadique que les autres - et ne va jamais être questionné dans ses choix ou décisions. Le second arc présentait la même structure, à la différence près qu'il lui était interdit de tuer (puisqu'il affrontait les Avengers, autrement la régalade eut été présente). 
 
Sur le papier, Rosenberg exploite donc une bonne formule. Un esprit de série B faussement tactique ou faussement complexe, où le héros botte le cul des méchants, se tire de chaque situation et balance des répliques toutes faites avec le sourire - une sorte de plaisir coupable de gosse qui ne va pas plus loin. Le résultat colle en partie à Frank Castle, amène un peu de transgression à l'ensemble généralement calme et propret de Marvel, et devient un plaisir coupable raisonnable quand le héros va en plus chasser les meilleurs vilains qui soient - autrement dit, les nazis.
 

 
Problème, la série Punisher ne semble avoir rien d'autre à proposer. Répétitive, celle-ci n'amène aucun relief à Frank Castle qui devient une parodie plutôt grasse ou militarisée de sa complexité habituelle, une série qui ne propose pas d'interactions poussée, de réelle analyse géopolitique, d'évolution de personnage. Le schéma "Castle va à tel endroit, bute des types, d'autres types essayent de l'arrêter mais z'y arrivent pas, l'est trop fort ce con, haha" trouve d'énormes limites dans cette introduction qui ressemble plus au troisième chapitre d'une saga de revenge movies
 
Par une sorte de logique malsaine, le Punisher serait absout d'avoir collaboré avec l'Hydra le jour où il aura assassiné le dernier membre de l'organisation - là-encore, on pourra se demander si Rosenberg comprend la motivation première de Frank, qui n'est pas juste de flinguer des gens pour se faire plaisir. Maintenant, si vous n'aviez pas lu les deux arcs précédents et que vous adhérez au délire (c'est compréhensible), n'hésitez pas à plonger dans ce World War Frank, qui reste rythmé, efficace et généreux en tant que numéro d'action pure. Derrière, il n'y a pas de réelles attentes à entretenir sur l'aspect polar, militaire ou politique de l'ensemble, et le risque de voir la structure se répéter est forcément présent.
 
En résumé, pour la couverture de Greg Smallwood, la mise en scène de Kudranski et si vous avez en vous une sorte de pulsion morbide qui vous pousse (parfois) à contempler l'idée de provoquer la mort de votre prochain, lisez Punisher #1. Après quoi, vous pourrez appeler un psy. Dans l'ensemble, ce premier bon numéro n'enlève pas de la tête l'idée que Rosenberg manque peut-être d'idées pour pousser son Frank Castle plus loin que le simple héros bourrin et borné qu'il s'acharne à proposer jusqu'ici. C'est malheureux mais le Big Pun paraît plus fidèle à lui-même dans le Cosmic Ghost Rider de Donny Cates - comme quoi, ce n'est pas l'habit qui fait le vengeur. 
Corentin
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