Réputé pour son dessin hyper détaillé et à l'approche photo-réaliste, le dessinateur Mico Suayan nous a régalés ces derniers temps par ses travaux pour l'univers Valiant, et notamment sa participation au run de Bloodshot de Jeff Lemire. A l'occasion de sa présence aux côtés de Bliss Comics pour la récente Comic Con Paris, nous avons profité d'un moment de pause entre deux dédicaces pour poser à Mico Suayan quelques questions. Bonne lecture !
Commençons par le début. Comment as-tu démarré dans les comics ?
J'ai sûrement commencé vers mes 17 ans, si je me rappelle bien. J'ai soumis des échantillons à d'autres artistes philipins, je traînais avec eux, et on a commencé à me donner du travail. Des livres pour enfants, en majorité. Quelques années après, j'ai postulé comme storyboarder pour une entreprise publicitaire, ce qui a duré plusieurs années. Pendant ce temps j'ai continué d'enrichir mon portfolio, et j'ai finalement envoyé mes dessins à Marvel et DC, en ligne. Après quelques jours, j'ai eu une réponse de Joe Quesada. Ils m'ont donné du travail - je crois que c'était du Magneto - et c'est comme ça que l'histoire s'est faite.
Quelle est la grande différence entre les éditeurs avec qui tu as travaillé ?
Je ne trouve pas qu'il y ait tant de différences. Mais en travaillant avec Valiant, je trouve que ces derniers sont plus arrangeant, notamment avec ma vitesse de dessin, car je travaille lentement. Ils s'ajustent à mon rythme, mes deadlines sont plus flexibles. Alors que chez DC et Marvel, c'est plus strict et c'est pour ça que je travaille moins avec eux : j'y fais plutôt des couvertures.
Tu avais un attrait particulier pour l'univers Valiant ?
En fait j'ai été contacté par l'éditeur avec qui je travaillais chez Marvel, Warren Simons. Il m'a donné quelques couvertures à faire, puis du travail sur des planches intérieures. Ensuite, j'ai signé pour une exclusivité de trois ans, et ça fait bientôt six ans que je travaille chez eux.
Tu as fait Bloodshot, puis Bloodshot Salvation. Tu as pu voir l'évolution du personnage, comment l'as tu ressentie ?
Quand j'ai commencé sur Bloodshot Reborn, je n'ai fait que les quatre premiers numéros. Par après, je n'ai pas lu les numéros suivants. Pour être honnête, je ne suis pas un grand lecteur de comics, sauf lorsqu'il s'agit de ceux sur lesquels je travaille. Je n'avais donc aucune idée de ce qui était arrivé après mes numéros. Lorsque j'ai commencé Bloodshot Salvation, je me suis rendu compte que beaucoup de choses avaient changé. J'ai dû donc tout relire pour avoir les bonnes références sur la série (rires) !
Quelle est ta relation de travail à Jeff Lemire ?
On n'interagit pas beaucoup, en fait. En termes de travail sur le comicbook, je dialogue surtout avec mon éditeur et son assistant. De temps en temps, j'ai suggéré quelques choses à Jeff, notamment pour le design de personnages. Et il y a eu un moment où il était tellement occupé que j'ai dû écrire l'une des pages d'un numéro. C'était une scène d'action, donc c'était plus facile pour moi. Mais c'est à cette distance que s'arrêtent nos échanges. Je l'ai néanmoins rencontré en convention, on avait pu discuter du futur de Bloodshot ensemble, c'était juste avant "Bloodshot Island".
J'aimerais bien aborder ta façon de dessiner, qui n'est pas conventionnelle.
Tu veux dire, pour les détails ? C'est certainement pour ça que je suis si lent, parce que je fais beaucoup de recherches, sur les vêtements, les visages des personnes. Avant de dessiner, je fais beaucoup de recherches en ligne : des designs pour les voitures, les vêtements. Et de temps en temps j'utilise des références personnelles, je me prends en photo et regarde comment la lumière réagit à certains endroits. C'est ce qui rend le style réaliste, ce sont toutes les références et recherches que j'utilise.
Et sur le procédé technique, tu dessines de façon traditionnelle ?
Oui, tout à fait. Mais j'ai commencé à travailler un peu de façon numérique. Je fais des roughs crayonnés au format numérique, que j'imprime ensuite. Et je travaille l'encrage directement là dessus. Ca me fait gagner pas mal de temps, de façon à pouvoir dessiner vingt pages par mois (rires) !
Il y a beaucoup de violence dans Bloodshot ? C'est quelque chose que tu aimes dans les comics ?
Pas particulièrement. Si c'est nécessaire d'avoir une scène violente, ça ne me dérange pas de la dessiner. Mais il faut que ce soit nécessaire à l'histoire. Je fais confiance à Jeff Lemire là dessus. S'il me demande de dessiner Bloodshot qui se fait exploser la tête, ce n'est pas un problème pour moi. Ca fait partie du personnage, aussi, de se faire tirer dans la tête puis de guérir !
Avec Bloodshot Salvation, tu as partagé la charge de travail avec Lewis Larosa. Comment vous êtes vous organisés ?
Avant qu'on travaille ensemble, on se parlait souvent. A la fois sur un point de vue professionnel, mais aussi parce que je suis fan de son travail : il est vraiment bon ! Et au fil du travail sur Bloodshot Salvation, on a dû se partager pas mal de références, il a fallu qu'on communique beaucoup plus ensemble.
J'imagine que tu sais qu'il y a un film Bloodshot. Tu es impliqué là dedans ?
Non. Je pense que Lewis Larosa est un peu plus impliqué, puisqu'il a fait un pin-up de Vin Diesel en Bloodshot. Je crois que la plus grosse implication que j'aie avec le film, c'est que Vin Diesel a signé une couverture que j'ai faite - c'est celle là d'ailleurs [il montre la couverture de l'édition N&B de Bloodshot Salvation]. Mais j'espère que je serais invité à l'avant-première !
Et tu aurais peut être un remerciement dans les crédits...
Oh, si ça arrive, je prendrai une photo dans la salle de cinéma (rires) !
Quels sont tes futurs projets ?
En ce moment, je fais surtout des couvertures pour Valiant, Marvel et DC. En termes de planches intérieures, je vais faire du [désolé, ça doit rester secret] chez Valiant, et je pense qu'au courant de l'année prochaine, je pourrais commencer un autre projet secret avec un éditeur très populaire... dont je ne peux rien dire pour le moment, désolé !
Merci beaucoup !
- Pour les intéressés, le premier tome de Bloodshot Salvation est disponible à ce lien.
Remerciements : Bliss Comics