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Captain Marvel : Lettre d'amour aux super-héroïnes

Captain Marvel : Lettre d'amour aux super-héroïnes

ReviewCinéma
On a aimé• Une Brie Larson merveilleuse
• Le propos émancipateur, plus que bienvenu
• Goose est à miauler par terre
• Globalement, toutes les femmes de ce film, de 12 à 60 ans
• Certains personnages plus nuancés qu'il n'y paraît
On a moins aimé• Une première partie poussive
• Le scénario d'origin story sans réelle surprise
• Une certaine mollesse dans le montage et la mise en scène de l'action
• Des connexions parfois trop instables avec le S.H.I.E.L.D. et la phase 1 du MCU
Notre note

Disclaimer : cette critique vous est proposée par Océane (@Octanexit), qui nous prête sa plume à l'occasion de cette nouvelle sortie des productions Marvel Studios !

Nous sommes en 2019 et Marvel Studios semble enfin comprendre qu'il était temps que d'autres personnages, ni masculins, ni hétéros et ni blancs, puissent avoir leurs propres histoires et leurs aventures au cinéma (une pensée pour Peggy Carter, disparue trop tôt de nos écrans de télévision). Après Black Panther l'an dernier, c'est au tour de Captain Marvel d'avoir enfin le droit à une origin story. Qui plus est, réalisée par une femme - à 50% certes, mais écoutez, c'est un début. Et puis, on a enfin à côté un film Black Widow mis en scène à 100% par une femme qui arrive, il faut comprendre les studios, le concept de "réalisatrice" met parfois du temps à monter au cerveau de certains.

Toujours est-il que cela fait plaisir d'enfin voir la fabuleuse Carol Danvers enfiler le costume de Captain Marvel, ne serait-ce que pour le privilège de voir l'une des plus grandes héroïnes Marvel embraser l'écran de ses poings enflammés. Passée sous plusieurs identités et costumes dans sa longue histoire, Carol a le droit depuis plusieurs années, et notamment grâce à Kelly Sue DeConnick, de passer derrière le légendaire Mar-Vell. La scénariste a d'ailleurs droit à un caméo dans le film, façon Ed Brubaker dans The Winter Soldier.


Un choix étrange de Marvel Studios : situer le film dans les années 1990, loin de tout le tumulte provoqué par Avengers : Infinity War, d'autant plus curieux que l'intrigue n'apporte pas de réelle plus-value, au final, à l'univers partagé. Ici ou là se glisse une référence à des personnages que l'on retrouvera vingt ans plus tard dans les Gardiens de la Galaxie, un Nick Fury avec les deux yeux en face des trous, et un jeune Coulson encore rookie qui n'apporte rien au moulin. 

Les choses commencent d'ailleurs très mal avec une introduction expéditive dont le seul but est de nous communiquer un maximum d'informations en un temps très réduit. Le montage est brutal, les personnages introduits à la hâte, et l'on sent clairement que les scénaristes ont mis la charrue avant les Goose. Les enjeux, pourtant, sont clairs et se résument à la guerre entre les Kreeset les Skrulls, et au milieu de tout ce bordel, "Vers", une jeune femme recueillie par les Krees, commence à réaliser qu'on a peut-être fait n'importe quoi avec son passé.

Bref, rien de bien neuf sous le soleil de Marvel Studios. L'origin story est convenue, et concernant le décalage terrestre de Carol, la même chose a été faite il y a huit ans avec un certain Dieu nordique qui entrait dans une boutique animalière du Nouveau-Mexique pour demander un cheval à un pauvre commerçant. Le contexte des années 1990, d'ailleurs, évoqué plus haut, ne sert que pour quelques références musicales, et aussi pour faire un dernier adieu à Blockbuster Videos, petit ange parti trop tôt.

Il est également dommage que la mise en scène ne suive pas la plupart du temps, malgré des tentatives inspirées de créer des scènes intimistes, caméra à l'épaule, pour capter l'amitié immense qui lie Carol et Maria (Lashana Lynch). De la même manière que la photographie ne restera pas dans les annales, et que la musique, pourtant efficace, ne bénéficie pas d'un thème marquant. Du côté du montage, sur une échelle de 0 à Bohemian Rhaspody, disons que l'ensemble reste lisible, mais qu'il manque cruellement de dynamisme dans les scènes d'action. On reste dans des zones créatives désespérément balisées, et l'ensemble manque globalement de prise de risque.


Alors, pourquoi est-ce que le film finit par fonctionner, en grande partie ? Tout simplement parce que comme son héroïne apprend finalement à se connaître, et à appréhender ses forces autant que ses faiblesses, Captain Marvel finit par comprendre que derrière la timidité apparente de son projet se cache un réel coeur, trop souvent bridé dans les films de ce studio. Il est salvateur de voir l'héroïne s'émanciper d'un carcan très masculin pour embrasser son plein potentiel et embarquer avec elle Maria et Monica Rambeau, pour ne citer que ces deux personnages. Plus généralement, le film est une déclaration d'amour à la force des femmes, à leur combativité, leur intelligence et à leur capacité d'affronter le catcalling aussi bien que n'importe quelle menace alien tout en restant résilientes, en acceptant leurs échecs et en sachant se relever quoiqu'il arrive.

Et forcément, bien qu'on n'en doutait pas, Brie Larson porte le film sur ses épaules. Mélange de vulnérabilité et de grande gueule, dont l'alchimie avec chaque acteur et chaque actrice du casting est immédiate, Larson irradie l'écran d'une présence optimiste, souvent sur le point de céder face à l'ennemi, mais toujours prête à rendre les coups. On insiste d'ailleurs sur la notion de combativité, d'agressivité, parce que c'est contre quoi lutte, finalement, le personnage de Captain Marvel. On oserait même dire que l'un des ennemis de l'héroïne est le patriarcat, la masculinité toxique qui enferme Carol dans un mode de pensée dépourvu de qualités vues comme féminines (et donc faibles) : la nécessité d'embrasser ses émotions, de faire preuve d'empathie, notamment. Son ultime dialogue avec l'un des antagonistes masculins le résume très bien : ni elle, aucune femme, n'a besoin d'une quelconque validation masculine pour exceller dans un domaine qu'elle maîtrise.


Parlons enfin des Skrulls, puisque ce film marque leur arrivée dans le MCU. Menés par un Ben Mendelsohn à qui les touches d'humour façon Marvel vont étonnamment bien malgré le sérieux et la menace de ses motivations, leur entrée est assez réussie et a le mérite d'offrir un peu plus que la fadeur habituelle de beaucoup des méchants du MCU. Il est intéressant, qui plus est, de voir Marvel parler une nouvelle fois de guerre, de ses victimes et des dommages civils collatéraux. Un semblant de réflexion déjà amenée par Thor Ragnarok, et sa conclusion, qui voyait les Asgardiens comme des migrants sans nation à habiter, mais ici amené à un degré bien plus important.

Apprécier un film pour ses belles valeurs de tolérance et d'inclusion peut sembler facile. Mais c'est pourtant ce qui se retrouve au coeur de Captain Marvel, et ce qui parvient, au finish, à hisser le film dans la catégorie des productions honnêtes de Marvel Studios. Bien sûr, celui-ci aurait pu être meilleur, et il est évidemment décevant de voir que les producteurs (habituels) se contentent une nouvelle fois de laisser leurs héros baigner dans cette qualité passable, là où nous aurions pu avoir un véritable grand film. Néanmoins, entre la recherche d'un acteur gay pour "Eternals" et un projet Miss Marvel avec Kamala Khan dans les tuyaux, notamment, réjouissons-nous de cette volonté - de l'un des, voire du plus grand studio du monde à l'heure actuelle - d'offrir ces perspectives et ces histoires différentes, loin du modèle blanc, hétéro et masculin dominant l'ensemble de la phase 1 du MCU. Les résultats ne sont, certes, pas encore parfaits, mais souvenons-nous de la petite Carol, qui tombe de son vélo : c'est à force de chuter et de réessayer encore et encore, qu'elle a fini par être la meilleure dans sa catégorie.

Corentin
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