En cette période d'anniversaire de Batman, quelle meilleure célébration DC pouvait-elle offrir que par la parution d'un imposant Detective Comics #1000 qui, comme son prédécesseur Action Comics l'année passée, profitait de cette étape importante pour ramener avec lui une ribambelle d'auteurs et artistes avec lui ? Au sortir d'un numéro riche et varié, le constat est favorable : après huit décennies, il fait toujours bon de lire du Batman.
Même sans être lecteur de DC Comics depuis longtemps, il sera facile de remarquer que l'éditeur à deux lettres a une certaine affection pour les numéros anthologiques - l'opération avait déjà été réalisée d'ailleurs avec le Detective Comics #27 de 2014, qui marquait les 75 ans de Batman. L'opération est là semblable, avec une douzaine d'histoires réalisées par des équipes comptant les plus gros noms de l'industrie opérant actuellement chez DC, ou ayant participé à ce que le Chevalier Noir est devenu aujourd'hui. L'introduction de Scott Snyder et Greg Capullo, en reprenant la thématique de l'importance des histoires, contenues dans les livres, peut être vue comme un miroir de ce Detective Comics #1000, où les histoires lues par Batman sont celles retrouvées par la suite. Une amorce sympathique, qui laisse voir quelques jolies trouvailles.
Bien entendu, la critique aura tendance à toujours être la même lorsqu'il s'agit de s'attarder sur un numéro anthologique - puisque la qualité des histoires est forcément relative, et qu'on pourrait conclure qu'il "y a du bon comme du mauvais". Dans l'ensemble, le tout tire vers le haut d'un point de vue qualitatif - à la fois par la prestation artistique, qui ne laisse désirer qu'à une seule ou deux occasions (Neal Adams n'a vraiment plus le niveau d'antant, désolé pour lui), que pour les histoires racontées. Il s'agit là de célébrer 80 années d'histoires, et de revenir donc sur des thématiques importantes, qui façonne le personnage et ce qu'il est aujourd'hui, tout en montrant que Batman est devenu un héros bien loin d'être si solitaire que ça.
Les propositions sont dans leur ensemble assez variées. Après le passage de Snyder, le récit sur Batman et son rapport aux armes à feu - et à une en particulier - est très bien écrit par Kevin Smith, qui profite en outre d'un Jim Lee en vraie forme, qui aura pris le temps de dessiner ces quelques planches, pour un résultat bien meilleur que certaines de ses dernières prestations. Retrouver dès après Paul Dini et Dustin NGuyen (avec forcément quelque clin d'oeil à leur précédent run sur le titre) est la partie humoristique de ce numéro, témoignant que le Batverse n'est pas exempt de quelques légèretés. Quand on peut également retrouver des essais qui vont dans une autre réalité (le curieux tandem Geoff Johns/Kelley Jones, qui prime plus pour sa partie graphique) que vers le futur - avec la très belle prestation d'Alex Maleev qui nous propose un Bruce vieillissant mais toujours alerte, par Brian M. Bendis.
Par leur rareté, la présence de Warren Ellis et Becky Cloonan est un autre facteur de félicité pour le lecteur - puisque l'histoire reste sympathique sans trop en apporter -, alors que Christopher Priest et Neal Adams ont plus de mal à convaincre, ou que le récit de Dennis O'Neil surprend par son amertume - alors que la mise en scène de Steve Epting est splendide. Le rapport de Batman à sa famille et ses protégés s'illustre également, d'une part avec Tynion IV et Alvaro Martinez (qui tenaient les rênes du titre avant de les laisser à Peter J. Tomasi) se permettant d'étendre l'historique de Dick Grayson, quand Tom King, Tony S. Daniel et Joëlle Jones viennent rappeler que la Bat-famille s'est bien agrandie en 80 années, et qu'elle reste indispensable au personnage.
En somme, c'est un tour d'horizon assez vaste sur Batman que Detective Comics #1000 nous propose, quoiqu'on puisse lui reprocher de ne pas aller voir toutes les facettes possibles, ou qu'il y aurait eu plus de mérite à regarder plus vers l'avant plutôt que de se contenter d'un simple anniversaire. Si le récit de Peter J. Tomasi est là pour lancer le prochain arc (avec la version canonisée de l'Arkham Knight), le reste des histoires à plutôt vocation à simplement regarder en arrière, quand par exemple un Detective Comics #27 se permettait de teaser le futur du Chevalier Noir (rappelez-vous de Snyder et Murphy). Il faudra donc encore patienter pour en savoir plus sur les projets de DC pour la poursuite des aventures de Batman. En l'état, la lecture reste globalement satisfaisante - et pour l'exercice, c'est bien ce qu'on pouvait espérer.
Que vous soyez lecteur de longue date ou à peine familier avec Batman, Detective Comics #1000 arrive à point nommé pour faire un tour assez large de ce que le personnage peut offrir. D'une qualité artistique élevée, avec des équipes créatives prestigieuses (quoique certaines soient un peu moins inspirées que d'autres), l'anthologie rappelle à l'heure d'aujourd'hui pourquoi on ne se lasse pas de suivre les aventures du Chevalier Noir, ce même après 80 années d'existence. Ne reste qu'à espérer au super-héros, ainsi qu'à tous ceux qui l'accompagnent, un avenir brillant d'aventures dark ou pas trop.
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