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Next Men de John Byrne : les nouveaux super-héros

Next Men de John Byrne : les nouveaux super-héros

ReviewIndé
On a aimé• La modernité du propos
• Les multiples niveaux de lecture
• L'esthétique, du grand John Byrne
• La richesse de caractère des héros et la très grande variété de personnages toujours bien traités
On a moins aimé• Les ellipses et sauts dans le temps, parfois un peu brutaux
• Le grand méchant qui disparaît pendant plusieurs chapitres sans qu'on sache trop ce qu'il fait ou prépare, atténuant un peu la menace qu'il est censé représenter
Notre note

Article rédigé par Jaime Bonkowski 

Next Men. Quiconque est familier du travail de l’illustre John Byrne, grand manitou du succès de Marvel dans les années 80, tandem par excellence de Chris Claremont sur X-Men et grand nom de l’histoire du comics, connaît au moins de réputation cette série parue dans les années 90, synthèse de tout ce que l’auteur a apporté au monde du comics. Un équipe de super-héros cultivés en laboratoire, élevés dans un monde fictif et brutalement plongés dans notre réalité crasse, tentant de concilier les grandes responsabilités impliquées par leurs grands pouvoirs avec leurs propres faiblesses bien humaines. Delirium sort en février le second tome d’une intégrale sur ce singulier chef d’œuvre. Bilan.

Des capes, des masques et des hommes

Ce qui caractérise le travail de John Byrne, aussi bien sur Next Men qu’auprès d’autres héros et licences, c’est l’humanité avec laquelle il aborde ses personnages. Certes, il nous présente des super-héros, des demi-dieux, mais ils ne sont presque que des prétextes pour aborder des thèmes très humains : la peur, la politique, la guerre, la sexualité, la famille. La grande contribution de John Byrne à l’histoire du comics, c’est d’avoir (avec d’autres bien sûr) humanisé les super-héros, de les avoir confronté à des difficultés bien plus terre à terre et réalistes que des menaces galactiques et des sorciers suprêmes. Next Men synthétise à merveille cette volonté de parler de l’humain à travers le surhumain.
 
Plus encore que leurs pouvoirs et leurs capacités, ce sont par leurs failles que les Next Men sont passionnants. Ils ont peur, ils doutent : Bethany perd son lien avec l’humanité, Jack craint sa propre force, Danny a besoin de réponses sur son passé, et ainsi de suite. C’est aussi pour ça qu’ils se confrontent surtout à des menaces bien humaines plutôt qu’à des super-vilains à proprement parler. Dirigeants véreux, magouilles géopolitiques, conflits juridiques et autres bassesses tristement réalistes donnent bien plus de fil à retordre à l’équipe que leurs adversaires mutants, au final très peu présents dans la série.
 

 
Et si le “grand méchant”, Sathanas, est l’incarnation par excellence du vilain de comics (un squelette-robot-cyborg machiavélique, excusez du peu), il n’est au final qu’un pendant surnaturel pas si différent de son acolyte et homme de paille le sénateur Aldus Hilltop, autre chef d’orchestre maléfique qui s’oppose aux Next Men, et qui évoque furieusement certaines figures de l'ancienne administration Trump.
 
La modernité du propos est bluffante. Dès le début de sa carrière dans le comics, John Byrne a eu à cœur d'offrir une place de choix aux minorités et d'aborder des sujets sensibles (rappelez-vous de Gay Guy, le héros homosexuel de sa première BD) et il réitère avec Next Men. Au fil des pages on croise donc le racisme, la question du viol et de la pédophilie, et également des sujets moins lourds mais tout aussi importants et rares dans le comics comme les relations au sein de la famille, l'adultère, le pardon. Autant de facettes qui confèrent à l'œuvre une contemporanéité exemplaire, si caractéristique du travail de l'auteur.

Une esthétique classique et singulière à la fois

Graphiquement, Byrne déploie toute la maîtrise conférée par ses années d’expérience dans la cour des grands. Entendons-nous bien, ce style que d’aucuns qualifieraient de “conventionnel” ou de classique par rapport aux comics des années 70 et 80, c’est en partie John Byrne qui l’a façonné. Normal donc de le voir s’y épanouir ainsi. Il profite néanmoins très largement des libertés permises par l’édition dans une structure moins autoritaire que DC ou Marvel pour expérimenter des choses intéressantes, particulièrement autour de son personnage Nathan, alias Scanner. Ce dernier peut voir sur une longueur d’ondes bien supérieure à celle d’un humain normal, des infrarouges jusqu'aux rayons gammas. Quand l’auteur nous place donc dans sa vision, il joue sur les contrastes, les couleurs, les formes pour nous donner à imaginer ce que Nathan “voit”.

Au niveau des charas-designs, on retrouve beaucoup d’inspiration de ses anciens travaux. Bien loin de nous l’idée d’évoquer une quelconque copie, mais certains des Next Men ressemblent pas mal à quelques X-men (Cyclope et Nathan, Quicksilver et Danny, Bethany et Emma Frost, que Byrne a par ailleurs co-créé). Mais ces similarités tiennent bien plus de l’inspiration que de la reprise pure et simple, et rassurez-vous, elles ne s’étendent qu’aux visuels. Les pouvoirs, caractères, personnalités des personnages sont eux bien à part. 

On remarque aussi la prégnance des exosquelettes et autres bidules technologiques, pas sans rappeler Terminator ou Robocop. Byrne travaille autant visuellement qu’avec ses intrigues sur le rapport entre l’humain et la machine, que ce soit en plaçant à l’origine ses héros dans un monde virtuel généré par un ordinateur qu’ils prennent pour la réalité (vous avez dit Matrix ?), ou en couplant leurs capacités avec des machines pour les aider à les contrôler ou pour en développer le potentiel.


 

Et d’une manière générale, l'essentiel de la série se déroule dans des labos futuristes, des entrailles de vaisseaux du futur, des super-prisons high-tech… En ce sens, Next Men est bien plus proche d’un récit de science-fiction que de super-héros à proprement parler, à l'instar des œuvres antérieures de l’auteur. Et l’influence, supposée ou assumée, de cet univers sur d’innombrables références de la pop culture qui ont suivi, n’est plus à prouver.

Que ce soit pour son statut de jalon dans l’œuvre de John Byrne, son héritage dans le monde de la pop culture, ou le fait qu’elle soit l’aboutissement de tout ce que l’auteur a entrepris comme changements dans l’industrie du comics, Next Men est une série qui mérite qu’on s’y attarde. Et, comme d'habitude, Delirium nous offre une qualité d’édition exemplaire qui décuple le plaisir de la découverte. On saluera tout particulièrement les très intelligentes préfaces qui contextualisent à merveille la série. En bonus non négligeable, l'éditeur propose d'ailleurs une version limitée du tome deux, tirée à 400 exemplaires avec pour couverture un design magnifiques signé Frank Miller. Sympa. Les fans de comics comme les néophytes peuvent donc se jeter sans hésiter sur ces pièces de choix.

- Vous pouvez commander le premier tome de Next Men Intégrale ici
- Vous pouvez commander le second tome de Next Men Intégrale ici

La Redac
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