Coup de théâtre pour Joker : Folie à Deux. Le démarrage film de Todd Phillips avait été estimé, relativement récemment, pour un montant compris entre 120 et 150 millions de dollars aux Etats-Unis. En définitive, à l'aune des réservations déjà enregistrées et de la fréquentation des salles du cette année, la rédaction de Deadline pense que celui-ci devrait s'ouvrir sur un montant plus modeste. A trois semaines de la sortie du long-métrage, Warner Bros. devrait apparemment se contenter d'un premier weekend à... 70 millions. Pas de quoi faire sauter le champagne, surtout que le premier Joker s'était lancé, de son côté, sur un score de 93 millions. Pour l'époque, une belle performance compte tenu du budget (55 millions) et du classement (pour adultes) de cette relecture tronquée du célèbre clown de Gotham City.
Who's Laughing Now ?
Le degré de dangerosité repose justement sur la différence de philosophie à l'origine des deux films : pour le premier
Joker,
Warner Bros. n'était pas forcément emballé par la perspective d'une grosse production classé "R" et avait donc prévu un budget restreint pour minimiser les risques. Cette consigne a permis à
Todd Phillips de s'exprimer plus librement, puisque le studio n'aurait de toutes façons pas perdu beaucoup d'argent en cas d'échec. Mieux encore, le groupe
avait même sollicité deux partenaires extérieurs (
Village Roadshow et
Bron Studios) pour participer au financement général, afin de minimiser son propre investissement. Comme quoi, chez
Warner Bros., on n'a pas attendu la présidence de
David Zaslav pour se tailler une solide réputation de crevards. En définitive,
Joker est devenu l'adaptation de comics la plus rentable de tous les temps avec 55 millions de budget pour 1,080 milliards de chiffre d'affaire... mais le studio a été obligé de partager ces gains avec ses deux partenaires, une sorte de sanction pour ne pas avoir cru au potentiel du projet.
Finalement, au moment de mettre en route Joker : Folie à Deux, les producteurs ont décidé de faire exactement le contraire : doper le budget au maximum en partant du principe que la franchise était désormais devenue une valeur sûre et qu'il n'était donc plus possible de se planter. Avec une enveloppe de 150 à 200 millions de dollars avant les frais publicitaires (et sans vouloir être paranoïaque : pour une campagne marketing étalée sur plus d'un an, on pourrait logiquement se dire que celle-ci a dû coûter plus de 100 millions), le film risque bien de devoir atteindre 500 à 600 millions de dollars pour atteindre un point d'équilibre. Autrement dit, le film a besoin de fonctionner, rapidement si possible.
Actuellement, Warner Bros. pourrait donc être en droit de s'inquiéter... sauf que justement, les chiffres sont trompeurs. Pourquoi ? Même s'ils en sont persuadés, les spectateurs des Etats-Unis ne représentent pas le seul parterre de consommateurs à l'échelle du globe. C'est tout bête : sur le résultat final du premier film Joker, les entrées à l'international représentent en fait 70% (743 millions) de l'argent généré. Le projet n'a eu aucun mal à trouver son public en dehors de son pays d'origine, notamment au Royaume-Uni (72,5 millions), au Mexique (43,9 millions), en France (43 millions), en Allemagne (43 millions) ou au Japon (46 millions). A noter d'ailleurs que cette somme récoltée à l'international a pu avoir lieu malgré l'interdiction du film en Chine, ce qui reste encore aujourd'hui une performance réellement impressionnante à l'échelle du cinéma des super-héros.
En somme, le démarrage de Joker : Folie à Deux aux Etats-Unis ne représente en réalité qu'une partie de l'équation dans le destin global de cette suite. Celle-ci ne va pas toutefois pas gommer le problème d'un budget de production probablement trop important, ou d'un succès critique bien plus modéré que son prédécesseur au sortir des premières critiques sorties des projections organisées pour la Mostra de Venise. En somme : Warner Bros. a encore la possibilité d'échouer. Et historiquement, le studio a eu tendance à se montrer créatif dès lors que cette opportunité se présente.