La mission d’un critique peut parfois s’apparenter à un sacerdoce. C’est dans état d’esprit que j’avoue avoir abordé la lecture de cet ultime numéro de Daredevil Reborn, concocté par Andy Diggle (The Losers, Thunderbolts) et Davide Gianfelice (Northlander). En effet, après un premier numéro enthousiasmant, cette mini-série n’avait cessé de décevoir. La faute à une histoire médiocre et trop convenue et à des dessins dont la qualité déclinait à mesure qu’on avançait. Pourtant, il est certains calices qui valent la peine d’être bus jusqu’à la lie, comme nous le rappelle ce quatrième numéro.
Alors attention, il serait exagéré de s’emballer et de crier au chef d’œuvre. Le scénario d’Andy Diggle reste toujours aussi convenu et dépourvu de la moindre surprise. En gros, les gentils gagnent, les méchants sont punis et notre héros malheureux trouve la rédemption qu’il recherchait. Exactement ce à quoi on pouvait s’attendre dès le premier numéro. De la façon dont Matt Murdock survit au cliffhanger de l’épisode précédent (il a esquivé au dernier moment) au dénouement final (il reprend son rôle de Daredevil, comme on pouvait s’y attendre vu que la série est rebootée en juillet), c’est du vu et revu. De même pour le petit garçon aveugle, qui avait droit à sa séquence mélodrame dans chacun des numéros précédents et qui remplit enfin la mission de ficelle scénaristique à laquelle il était destiné en étant l’élément déclencheur qui pousse Matt à jouer à nouveau les justiciers. Bref, de ce côté-là, pas d’amélioration.
En fait, ce qui rend ce numéro un peu meilleur que les deux précédents, c’est qu’on retrouve un petit peu de la maestria de Diggle dans la réalisation de son histoire. Cette même maitrise qui nous avait fait nous intéresser à la série de prime abord. Tout commence avec la scène entre le petit aveugle (Billy) et Matt. On pouvait craindre d’avoir encore droit à du mauvais pathos comme le mois dernier (la scène à propos de la mère de Billy) mais il n’en est rien. Et sans qu’on en arrive à verser une larme, la scène réussit tout de même à avoir un petit je-ne-sais-quoi de touchant. Cela notamment grâce à des dialogues efficaces par leur relative sobriété. Puis il y a la longue scène d’action opposant notre héros à Calavera et ses sbires, qui constitue le gros de ce quatrième épisode. Là encore, bien que sans surprise, c’est très bien réalisé et on retrouve avec plaisir ce cher Matt au sommet de sa forme. On appréciera même particulièrement la fin de la séquence, clin d’œil (avoué on suppose) à Man Without Fear de Frank Miller et John Romita Jr. Enfin les trois dernières pages, qui font office d’épilogue et préfigurent le reboot de la série, donnent un sentiment satisfaisant de paix retrouvée.
L’autre aspect de ce quatrième numéro qui contribue à ce sentiment global d’amélioration, c’est le dessin de Davide Gianfelice. Si l’artiste ne retrouve pas encore son niveau du début de la série, il corrige quand même certains errements qu’on lui avait reprochés le mois dernier. Ainsi l’aspect mal fini, pressé, de certaines cases a totalement disparu. Le trait anguleux de Gianfelice retrouve toute son efficacité, notamment dans la longue scène d’action, domaine de prédilection de l’italien. Les mises en page et cadrages sont quant à eux toujours irréprochables. Au final on ne déplorera que des arrière-plans trop souvent désespérément vides malgré les efforts louables du coloriste Matt Hollingsworth pour leur donner un peu de substance.
Ce quatrième et dernier numéro rectifie donc un peu le tir après les ratés des deux précédents. Il n’y a cependant pas de quoi les faire totalement oublier. A l’heure du bilan, on dira alors que malgré un début prometteur et un final satisfaisant, Daredevil Reborn reste une mini-série franchement dispensable. La quête de rédemption de Matt Murdock aurait mérité d’être plus qu’un enchainement de clichés exécutés avec plus ou moins de brio par un Diggle parfois efficace, et parfois à côté de son sujet. Les dessins de Davide Gianfelice resteront globalement comme le point fort de cette mini et laissent augurer du meilleur pour la suite de la carrière de l’italien. Il faudra cependant qu’il veille à éviter de se relâcher comme il a pu le faire dans la seconde partie du récit.
Les plus : Bien écrit
Un final satisfaisant
Un Davide Gianfelice retrouvé
Les moins : Une intrigue toujours aussi convenue
Des arrière-plans vides
Une mini-série qui fait un peu « bouche trou » en attendant le reboot de Daredevil
Notes
Scénario : 3,5/5
Dessin : 3,5/5
Globale : 3,5/5 (pour ce numéro)
3/5 (pour la série complète)