SVK c'est le dernier joujou de Warren Ellis. L'auteur à succès et créateur de Transmetropolitan, The Authority et Planetary entre autres choses prend le pari de révolutionner une nouvelle fois le monde du comic-book. Après une première édition tirée à 3 500 exemplaires épuisée en moins de 48h, le titre nous revient enfin. L'occasion pour Comicsblog.fr de vous proposer une critique de l'œuvre uniquement disponible sur le site des studios Berg.
SVK,
c'est avant tout la promesse d'une révolution. Le titre vous coûtera
10£ sur le site des studios Berg auxquels viendront s'ajouter 7£ de
frais de port. Pourquoi une telle somme pour 40 pages de lecture ?
La lampe UV livrée avec votre comic-book et l'encre spécial qui le
parcours. Ainsi, quand l'histoire se concentre sur l'histoire d'un
espion qui met la main sur une technologie permettant de lire dans
les pensées, Warren Ellis vous propose d'en faire de même au moyen
du gadget qui vient justifier le prix exorbitant de l'envoi. Drôle
deux secondes, l'idée ne peut que décevoir une fois la dernière
page tournée. Ellis est passé à côté de son affaire. Pour le peu
qu'on en voit, les pensées révélées par le jouet surtaxé
n'apportent presque rien au récit. Presque.
Ainsi, le fait de
ne jamais être en mesure de savoir ce que pensent le personnage
principal et son acolyte aide à s'identifier à ces derniers. Quant
aux pensées elles-même, certaines peuvent faire rire.
Malheureusement la plupart sont bien trop convenues. Surtout pour qui
a déjà lu Ellis. Le contrat n'est pas tenu, nos 17£ nous manquent
terriblement.
Seulement voilà, une fois passé la déception
pécuniaire et l'envie de faire cramer l'engin de malheur qu'on peine
à faire fonctionner quand on veut jouer aux magiciens, un constat
s'impose. Putain ce que c'est bon. Des comics comme SVK on voudrait
en lire plus souvent. Pas plus tard que le mois dernier Ellis a
prouvé qu'il savait écrire des histoires d'espionnage. L'enfoiré
récidive avec un brio hors norme. Le récit prend place dans un
futur proche. Il y est question de sécurité. De lutte contre le
terrorisme. Des thèmes d'actualité s'il en est. Une question
résonne par-delà les scènes d'action jouissives, les détours par
la planque de l'assistant du héros parsemée de composants électroniques à ne savoir qu'en faire et l'accent british qui vibre
au-delà des bulles. Jusqu'où a-t-on le droit d'aller pour assurer
la sécurité d'un peuple ?
Dans cet univers, la
question de la reconnaissance faciale est dépassée. Le récit en
lui-même en apprend peu sur l'environnement dans lequel notre héros
évolue. Pour compenser, Ellis a eu la très bonne idée d'intercaler
dans le livre des publicités fictives qui en disent long sur les
dérives de ce monde que l'on pourrait qualifier de pré-cyberpunk.
Le temps de la lecture de ces petites annonces sur lesquelles il est
facile de passer deux fois ce que la lecture de la bande-dessinée à
proprement parler vous prendra, le monde barré de Transmetropolitan
s'impose à l'esprit de ceux qui le connaissent. Enfin, la dernière page donne
matière à réfléchir sur la crédibilité de l'Angleterre
ultra-sécuritaire ici dépeinte par l'auteur britannique prolifique.
Certes facile, cette conclusion a le mérite d'être forte et de
faire de cette histoire un récit complet. Mention « très
bien » à D'Israeli dont le trait précis et agréable achève
de faire de ce comic-book un chef-d'œuvre.
Des
dialogues incisifs. De l'action. De l'espionnage. Des dessins
parfaits. Une narration dynamique parsemée de belles surprises.
Juste ce qu'il faut de réflexion. SVK pourrait s'en tirer avec une
note parfaite s'il n'était pas passé à côté de son principal
argument de vente. Distribué à 5£ sans promesse technique censée
révolutionner la narration, le bébé d'Ellis et D'Israeli pourrait
être LE comic de l'année à avoir. Malheureusement, son prix
prohibitif fera non seulement passer certains à côté d'une bonne
histoire mais décevra ceux qui pensaient tenir entre leur main
l'avenir des comics.