En charge de deux des nouvelles séries Avengers, Al Ewing m’avait plutôt séduit sur la preview géante qu’était Avengers #0. On y sentait deux nouvelles séries originales, avec matière à développement, et des styles et dessinateurs propices à l’exagération. Sur le papier c’était bien. Dans la pratique, on espère vraiment que The Ultimates donnera un meilleur résultat que ces New Avengers. Ou au moins de ce qu’on peut en voir sur ce premier numéro.
La série reprend un principe jeté par Jonathan Hickman sur son run d’Avengers : Roberto da Costa, a.k.a Sunspot, a utilisé sa fortune pour racheter l’A.I.M., ainsi que son île, et en faire une organisation légitime. Huit mois après Secret Wars, on retrouve ce qui s’appelle désormais l’Avengers Idea Mechanics, postée sur l’Avengers Island, et qui profite de son jet le plus rapide du monde pour aller résoudre les crises à l’international. En soit, c’est aussi la reprise de la série Avengers World, mais c’est surtout un gros melting-pot.
En effet, l’équipe a puisé dans les Avengers (Sunspot), les Mighty Avengers (Power Man, White Tiger), les Young Avengers (Hulking, Wiccan), les Thunderbolts/Dark Avengers (Songbird) et pour finir Squirrel Girl, parce qu’on veut jouer sur son début de popularité improbable (on appellera ça le « facteur Rocket », ou le « facteur Howard »).
Si on est huit mois après Secret Wars, et donc un temps inconnu après la création de l’équipe, on se trouve bien face à un premier numéro qui va amener un changement dans l’équipe, pour permettre une exposition maximale. Bienvenue donc à Hawkeye, imposé par Dum-Dum Duggan dans une scène qui aura au moins le mérite d’être drôle, mais est posée là pour présenter le statu quo, pendant que le reste de l’équipe part résoudre une crise à Paris.
Mais c’est là que le bât blesse. Si elle assure un côté décalé dans son propos, cette mission improbable souffre de deux grosses faibles : le manque d’interactions crédibles au sein de l’équipe, dans laquelle on a l’impression que tout le monde fonctionne par deux, mais ne va pas trop se mêler aux autres, et la teneur de l’intrigue en elle-même. Concrètement, pensez à un épisode de Doctor Who (presque littéralement tellement on reprend un concept déjà vu dans la série) dans lequel les Vengeurs viendraient tenter de sauver la donne. Et c’est peut-être là que Squirrel Girl est utile, pour augmenter le degré d’absurde d’une équipe qui pourrait tenir la route face à de vraies menaces. Honnêtement, on a du mal à juger de son utilité au-delà.
Bien entendu, un grand méchant se cache derrière tout ça, on le savait, on le connait, et on pourrait fortement l’apprécier s’il finit bien utilisé. Le tout est de ne pas le transformer en vilain lambda, mélange de Fatalis et de l’Homme-Taupe (ceux qui connaissent son identité en comprendront d’ailleurs l’ironie). Mais ce personnage s’accompagne malheureusement… de l’ancienne A.I.M. Car oui, la promesse de départ est brisée dès le premier numéro. Sunspot n’a finalement pas racheté et réhabilité l’A.I.M., il semble n’en avoir conservé que le sigle de l’organisation, et son île autrefois très avancée, transformée en complexe des Vengeurs. Quid des scientifiques, qu’on nous présentait comme fondamentalement pas mauvais dans certains numéros des Avengers de Hickman ? Ici, ils sont remplacés par une équipe de scientifiques connus mais de seconde zone dans l’univers Marvel, et les anciens de l’A.I.M. continuent de travailler pour le mal. (sic)
Rajoutons à cela un cliffhanger qui n’éveille pas vraiment l’intérêt, et on se retrouve avec une série très moyenne, tirant du côté de la déception, qui s’en sort à peine par son humour et le côté décalé des dessins de Gerardo Sandoval. L’artiste joue avec des proportions insensées, donnant un côté manga à son art, mais est loin des possibilités de story-telling qu’il laissait percevoir dans Avengers #0. On espère qu’il aura de meilleures occasions par la suite.
Au final, la série parvient à se démarquer de l’univers dont elle est originaire, mais peut-être de la mauvaise façon. Il aurait été préférable de tenter de construire les relations entre ses personnages, et d'élaborer leur place dans l’équipe, plutôt que de la confronter d’entrée de jeu à une menace qui s’avérera décevante dans sa forme. On croise vraiment les doigts pour The Ultimates.