Messie. Ennemi public numéro un. Visionnaire. Faiseur de luxe. Tous les qualificatifs ou presque on été attribués à ce bon Zack Snyder, qui ne pouvait pas échapper à notre loupe en cette semaine spécialement consacrée à Justice League, dont on a encore du mal à définir la paternité.
Pour mieux comprendre l'homme derrière la pellicule et apaiser les tensions après des années très crispées, revenons-nous sur la carrière du bonhomme, la puissance et l'influence de son style et ses obsessions favorites, celles qui forment la légende de Zack Snyder, l'homme qui tuait les mythes.
Si certains réalisateurs définissent leur style dès leur premier film, Zack Snyder n'est pas de ceux-là. Son premier long-métrage, remake de Dawn of the Dead, aussi appelé L'Armée des Morts par chez nous, est sans doute le moins Snyderien des Snyder. Mais ça ne veut pas dire que le film est générique pour autant, bien au contraire. En 2004, Snyder poursuit ainsi le travail de Danny Boyle en faisant courir ses zombies, et pratique déjà certaines de ses signatures, dont une utilisation millimétrée de la musique, comme le montre le générique monté sur The Man Comes Around de Johnny Cash, une piste personnellement sélectionnée par le réalisateur.
Il faudra toutefois attendre 2006 pour que le style du réalisateur soit identifiable du premier coup d'œil. En se lançant dans l'adaptation du polémique 300 de Frank Miller, Zack Snyder définit en effet son style dans un essai visuel encore sans équivalent aujourd'hui - vous n'avez qu'à voir son horrible suite pour vous en convaincre. La recette Zack Snyder se compose alors d'un savant mélange de slow et de fast motion rendant hommage aux machines à tuer musculeuses que sont les spartiates lorsqu'ils affrontent les innombrables armées du dieu-roi Xerxès.
Si beaucoup remarquent d'emblée la fidélité de Snyder aux cases et aux planches de la bande-dessinée d'origine, qui a la particularité d'avoir été éditée au format italien, le style du réalisateur ne s'arrête pas à un bête copié-collé. Certes, on retrouvera les images les plus emblématiques du 300 de papier, et Snyder va même jusqu'à imiter le traitement si particulier du sang dans l'œuvre de Frank Miller. Mais on note tout de même des influences plus personnelles, à commencer par la peinture.
Il se trouve que la mère de Zack Snyder enseignait la photographie et la peinture, que le petit Zack avait brièvement étudié en Angleterre après le lycée. Certains plans de 300 évoquent ainsi davantage la peinture baroque que les planches de Frank Miller. On sent également l'impact que des années de pratique dans la publicité ont pu avoir sur le réalisateur : les plans sont particulièrement travaillés, et utilisent toutes les possibilités qui s'ouvrent alors aux amateurs de fonds verts, pour un contrôle de la lumière et des couleurs assez hallucinant. C'est d'ailleurs le début d'une fructueuse collaboration qui commence puisque Snyder rencontre le chef op' Larry Fong. Le réalisateur, qui a également officié en tant que directeur de la photographie par le passé, toujours dans la pub, trouve ici un partenaire sur la durée puisque Fong reviendra pour Watchmen, Sucker Punch et Batman v Superman.
Le style Snyder se forgera dans les Thermopyles, mais sera très vite exporté à d'autres univers, dont celui de Watchmen. Une annonce qui avait fait grand bruit à l'époque, où on pouvait déjà constater que le bonhomme était né pour adapter des comic books, comme le montre son amour des voix-off, rappelant les monologues intérieurs de nos héros favoris, ou encore son utilisation d'inserts hyper détaillés, qui évoquent le morcellement d'une page de bande-dessinée. C'est avec toute cette science - depuis tant décriée - que Snyder ose perpétrer l'impensable : adapter l'œuvre d'Alan Moore et Dave Gibons. En mettant la qualité du film à part, on remarquera que le style Snyder s'installe alors définitivement, avec par exemple un vrai travail sur le mouvement des super-héros, qui comme les spartiates de 300, ne semblent pas évoluer sur le même plan que les autres personnages.
Cette notion d'un mouvement surhumain ou du moins extraordinaire est plus présente que jamais dans Ga'Hoole, premier et unique essai de Snyder à l'animation à ce jour. Le style du réalisateur ne change pas pour autant. Bien au contraire, il est encore plus explicite. En animant des hiboux de combat au ralenti, Snyder n'a plus à s’embarrasser des lois de la physique et nous offre ainsi une odyssée aussi bourine que colorée, qui séduit à l'aide d'oiseaux fendant les airs, la pluie et les chairs avec la même aisance.
Mais si le style de Snyder est plus visible que jamais, ironiquement, il est toujours associé à l'œuvre d'un autre. Après trois adaptations et un remake, le réalisateur entend donc faire ses propres armes avec Sucker Punch, dont il assure même le scénario. Le résultat est douteux pour certains, bluffant pour d'autres, mais il nous permet en tous cas de pointer du doigt de nouvelles influences, dont celle de la culture japonaise ou encore celles tirées du monde du jeu-vidéo, omniprésentes dans ce trip qui se veut féministe mais a du mal à l'être - mais on en reparlera.
Nous sommes alors en 2011 et le style de Snyder est devenu assez populaire pour être adoré, défendu ou critiqué par une autre formule que la sacro-sainte "réalisation clipesque" qui lui a été attribuée pendant tant d'années. Mais pour le réalisateur, le pire clivage reste à venir - un comble quand on a déjà adapté Watchmen, mais soit. Deux ans plus tard, le bon Zack revient en effet avec sa vision de Superman dans Man of Steel, qui surhomme oblige, exacerbe encore un peu plus son style et ses signatures, jusqu'à un final apocalyptique qui fait encore parler de lui.
Malgré des boucliers levés un peu partout, les détracteurs ne sont pas aussi forts qu'une phalange de spartiates et Snyder établit ainsi son camp chez DC avec un nouveau film promettant de réunir deux icônes, Batman et Superman, pour la première fois sur le grand écran. Un projet d'envergure et pourtant pris de cours par l'ascension du comic book movie. On connaît depuis le film sous le titre de Batman v Superman : Dawn of Justice, une sorte de prologue imparfait à Justice League. Deux films qui ont réussi, d'une manière ou d'une autre, à changer Zack Snyder. Frappé par une terrible tragédie en début d'année, le réalisateur le plus clivant de sa génération a depuis confié l'effort de guerre à Joss Whedon, l'architecte à peine secret de la concurrence. En cette semaine de sortie de Justice League, le style de Zack Snyder n'est donc plus aussi reconnaissable qu'on ne le croit, mais c'est ce qui rend le personnage passionnant à étudier.
Chapitre suivant >Une question de contexteLes lois universelles sont faits pour les laquais. Le contexte est fait pour les rois. Lorsque je pense à la filmographie de Zack Snyder et à son évolution, c'est cette formule tirée de Star Trek qui me vient à l'esprit. Il faut dire qu'avec près de quinze ans d'expérience à Hollywood, Zack Snyder a eu l'occasion de faire parler de lui. En bien comme en mal, mais surtout en mal ces derniers temps - et j'admets d'ailleurs ma part de responsabilité de ce côté-là. Moralité, si étudier les films du bonhomme est passionnant, étudier le contexte qui les entoure est nécessaire.
On mettra volontairement de côté la disparition de sa fille adoptive Autumn, révélée en mai dernier, pour éviter tout lien de cause à effet sordide. Reste le contexte public donc, suffisamment riche pour noircir des feuilles entières. Et pour cause, de mémoire récente, je ne connais pas une évolution aussi spectaculaire - dans le milieu hollywoodien en tous cas - que celle de Zack Snyder : sorti de (presque) nulle part, le réalisateur s'était imposé comme le nouveau chantre des geeks à l'aube des années 2010 pour finalement devenir une sorte d'ennemi public numéro un quelques années plus tard.
Pourquoi cette évolution radicale ? Qu'est-ce qui pousse Snyder a être vénéré par les uns et détesté par les autres ? C'est ce qu'on va essayer de comprendre ici. Mais avant tout de chose, et qu'on aime ou non le bonhomme, il faut rappeler qu'il est sans doute l'un des réalisateurs les plus influents de sa génération. Et on oublie souvent de le dire, la faute à des couches de haine ou d'adoration, qui ont ironiquement un point commun : le manque de nuance.
C'est certain, l'influence de Snyder sur le cinéma hollywoodien est colossale, même s'il est encore trop tôt pour qu'on l'ose se l'avouer. En vrac, on peut citer la fidélité des comic book movies à leurs planches d'origines, les films "juke box" (comme Baby Driver ou Guardians of the Galaxy) et bien sûr la gestion de plateaux entiers sur fonds verts pour un travail surréaliste des couleurs et de la lumière. Autant de phénomènes qui sont devenus monnaie courante à Hollywood en 2017, mais qui n'étaient peut-être pas aussi réguliers ou définis lorsque Snyder a fait ses armes. C'est sans doute ce qui conduit de grands réalisateurs et des metteurs en scène plus âgés comme James Cameron à citer Snyder comme une source d'inspiration.
Snyder s'est inventé son propre langage cinématographique. Cameron a eu raison de le rappeler, car comme le veut l'adage, on imite souvent, mais on égale jamais. En près de quinze ans, le style du réalisateur a été critiqué en long, en large et en travers et pourtant, personne ne semble avoir réussi à percer ses secrets. Toutes et tous ont pourtant tenté de récupérer à leur compte une ou plusieurs signatures du réalisateur pour impressionner dans les salles obscures, ou même sur le petit écran d'ailleurs. Une série comme Spartacus le montre bien : si elle met en scène des romains et non des grecs, elle témoigne de l'impact qu'a pu avoir Snyder sur notre perception d'un genre devenu rare, le Péplum.
Quoi qu'on pense de l'influence sur le milieu hollywoodien et au-delà, elle est donc indiscutable. Mais ça ne veut pas dire que le réalisateur surfe toujours sur la bonne vague. Bien au contraire, Zack Snyder a toujours évolué en eaux troubles. D'abord seul sur son rafiot face à l'océan, et désormais, en groupe, avec un plus gros vaisseaux et d'autres concurrents à flot. Il aura ainsi le malheur de sortir Watchmen avant que le super-héros ne devienne un genre à part entière dans les salles obscures. Avec huit ans de recul, le film et ses nombreuses versions se sont offert quelques partisans voire un culte solide, mais peu nombreux sont encore les cinéphiles qui remarquent l'aspect méta confié au film de Snyder avec les années. Ultra-violence, sexualité, exagérations visuelles ou sonores : le Watchmen de Snyder préfigurait les évolutions du comic book movie à l'heure où on ne parlait même pas de comic book movie.
Et lorsque le bonhomme récidive du côté des super-héros avec Man of Steel, il a le culot de proposer un film Superman jusqu'au-boutiste et qui ne s'excuse de rien, un an après le triomhe d'Avengers sur les écrans, et donc, l'arrivée de la formule Marvel à la Whedon en tant que tendance dominante chez nos amis encapés. Moins sanglant mais tout aussi violent que Watchmen, quelque part, Man of Steel scinde en deux camps les fans de DC au moment où le public des films de super-héros commence lui aussi à choisir un groupe ou l'autre. Une guerre de tranchées s'amorce, et ses victimes seront nombreuses.
La première d'entre-elles sera d'ailleurs le style de Snyder. On le remarque depuis Batman v Superman, premier crossover de la maison de DC au cinéma, le réalisateur semble avoir mis de l'eau dans son vin. Juste assez pour que ses thèmes favoris subsistent tout en proposant une direction artistique peut-être plus commune. Là où l'affrontement entre Batman et Superman aurait pu succéder au Budoken de Man of Steel, le duel se veut finalement très sobre, par exemple. Sans doute parce que le nom de Zack Snyder est fort, mais pas encore assez pour toucher à ce point aux icônes que sont Batman et Superman. Ajoutez à cela un studio bien pressé de rattraper son retard sur l'univers partagé de la concurrence, et vous obtenez une créature de Frankenstein assez fascinante, mais sans doute pas à la hauteur de la hype générée depuis la sortie de Man of Steel.
Quelque part, Zack Snyder a donc été rattrapé par l'industrie, celle-là même qui l'avait vite érigé en visionnaire. Ce qu'il était, j'en reste persuadé, mais ce qu'il a cessé d'être en acceptant de tronquer sa vision, par carriérisme, opportunisme ou simplement par envie de changement. Ou peut-être juste parce qu'il n'avait plus le choix. La logique derrière ce déraillage m'échappe, mais elle me semble tout de même liée à l'ampleur des héros DC et à leur valeur aux yeux de Warner Bros. Trublion quand il débute (L'armée des Morts, 300) visionnaire quand il s'agit de vendre l'invendable (Watchmen, Sucker Punch) et soudain bête machine à tout faire (Justice League), Snyder a été écrasé par la vague sur laquelle il n'a pas su surfer, celle déclenchée par le séisme des univers partagés, convoitée par un studio trop pressé.
A l'heure où Warner Bros a avoué ne plus vouloir travailler avec sa fameuse "famille de réalisateurs" cette explosion en vol n'a hélas rien d'étonnant. Et des producteurs mieux intentionés ou tout simplement moins paniqués auraient à mon sens compris que Snyder est fait pour surprendre et déranger. Expérimenter, en somme, dans des eaux inexplorées. C'est après tout ce qu'il a fait jusqu'à Sucker Punch, un film bourré de maladresses mais qui peut effectivement être vu comme une métaphore pro-choix, où des héroïnes choisissent de s'inventer une vie déjà oppressante pour oublier celle qu'elles vivent vraiment, encore plus dangereuse. Nous étions en 2011, et encore une fois, le film semble parfois confondre féminisme et voyeurisme, mais six ans avant Wonder Woman, Warner Bros était apparemment partant pour miser sur un film de super-héroïnes.
En somme, tout n'est qu'une question de contexte. Et celui des années à venir rendra peut-être grâce à Snyder, là où le bruit de fond derrière son nom semble aujourd'hui très négatif. Mais rien ne nous dit que son héritage sera vu positivement non plus. Surtout après autant d'affaires de productions et une tragédie familiale, qui rendent son legs complexe à explorer. A notre (petite) échelle, on ne souhaite qu'au bonhomme de retrouver son équilibre après tant de heurts. Et ça tombe bien, puisque son éloignement programmé des films de super-héros devrait lui permettre de renouer avec des thèmes qui lui sont chers.
< Chapitre précédentUn style à partChapitre suivant >Le grand déconstructeurIl se trouve que le prochain projet du réalisateur risque d'être l'adaptation du roman d'Ayn Rand, The Fountainhead, ou La Source Vive, en bon français. Un roman déjà adapté à l'écran, en 1949, et qui trouverait en Zack Snyder une adaptation moderne, mais tout à fait adéquate. En effet, il se trouve que le roman d'Ayn Rand est considéré comme l'une des premières pierres de l'autrice à la philosophie qu'elle inventera au fil des récits fictionnels et des essais : l'Objectivisme.
Si certains réalisateurs définissent leur style dès leur premier film, Zack Snyder n'est pas de ceux-là. Son premier long-métrage, remake de Dawn of the Dead, aussi appelé L'Armée des Morts par chez nous, est sans doute le moins Snyderien des Snyder. Mais ça ne veut pas dire que le film est générique pour autant, bien au contraire. En 2004, Snyder poursuit ainsi le travail de Danny Boyle en faisant courir ses zombies, et pratique déjà certaines de ses signatures, dont une utilisation millimétrée de la musique, comme le montre le générique monté sur The Man Comes Around de Johnny Cash, une piste personnellement sélectionnée par le réalisateur.
Il faudra toutefois attendre 2006 pour que le style du réalisateur soit identifiable du premier coup d'œil. En se lançant dans l'adaptation du polémique 300 de Frank Miller, Zack Snyder définit en effet son style dans un essai visuel encore sans équivalent aujourd'hui - vous n'avez qu'à voir son horrible suite pour vous en convaincre. La recette Zack Snyder se compose alors d'un savant mélange de slow et de fast motion rendant hommage aux machines à tuer musculeuses que sont les spartiates lorsqu'ils affrontent les innombrables armées du dieu-roi Xerxès.
Si beaucoup remarquent d'emblée la fidélité de Snyder aux cases et aux planches de la bande-dessinée d'origine, qui a la particularité d'avoir été éditée au format italien, le style du réalisateur ne s'arrête pas à un bête copié-collé. Certes, on retrouvera les images les plus emblématiques du 300 de papier, et Snyder va même jusqu'à imiter le traitement si particulier du sang dans l'œuvre de Frank Miller. Mais on note tout de même des influences plus personnelles, à commencer par la peinture.
Il se trouve que la mère de Zack Snyder enseignait la photographie et la peinture, que le petit Zack avait brièvement étudié en Angleterre après le lycée. Certains plans de 300 évoquent ainsi davantage la peinture baroque que les planches de Frank Miller. On sent également l'impact que des années de pratique dans la publicité ont pu avoir sur le réalisateur : les plans sont particulièrement travaillés, et utilisent toutes les possibilités qui s'ouvrent alors aux amateurs de fonds verts, pour un contrôle de la lumière et des couleurs assez hallucinant. C'est d'ailleurs le début d'une fructueuse collaboration qui commence puisque Snyder rencontre le chef op' Larry Fong. Le réalisateur, qui a également officié en tant que directeur de la photographie par le passé, toujours dans la pub, trouve ici un partenaire sur la durée puisque Fong reviendra pour Watchmen, Sucker Punch et Batman v Superman.
Le style Snyder se forgera dans les Thermopyles, mais sera très vite exporté à d'autres univers, dont celui de Watchmen. Une annonce qui avait fait grand bruit à l'époque, où on pouvait déjà constater que le bonhomme était né pour adapter des comic books, comme le montre son amour des voix-off, rappelant les monologues intérieurs de nos héros favoris, ou encore son utilisation d'inserts hyper détaillés, qui évoquent le morcellement d'une page de bande-dessinée. C'est avec toute cette science - depuis tant décriée - que Snyder ose perpétrer l'impensable : adapter l'œuvre d'Alan Moore et Dave Gibons. En mettant la qualité du film à part, on remarquera que le style Snyder s'installe alors définitivement, avec par exemple un vrai travail sur le mouvement des super-héros, qui comme les spartiates de 300, ne semblent pas évoluer sur le même plan que les autres personnages.
Cette notion d'un mouvement surhumain ou du moins extraordinaire est plus présente que jamais dans Ga'Hoole, premier et unique essai de Snyder à l'animation à ce jour. Le style du réalisateur ne change pas pour autant. Bien au contraire, il est encore plus explicite. En animant des hiboux de combat au ralenti, Snyder n'a plus à s’embarrasser des lois de la physique et nous offre ainsi une odyssée aussi bourine que colorée, qui séduit à l'aide d'oiseaux fendant les airs, la pluie et les chairs avec la même aisance.
Mais si le style de Snyder est plus visible que jamais, ironiquement, il est toujours associé à l'œuvre d'un autre. Après trois adaptations et un remake, le réalisateur entend donc faire ses propres armes avec Sucker Punch, dont il assure même le scénario. Le résultat est douteux pour certains, bluffant pour d'autres, mais il nous permet en tous cas de pointer du doigt de nouvelles influences, dont celle de la culture japonaise ou encore celles tirées du monde du jeu-vidéo, omniprésentes dans ce trip qui se veut féministe mais a du mal à l'être - mais on en reparlera.
Nous sommes alors en 2011 et le style de Snyder est devenu assez populaire pour être adoré, défendu ou critiqué par une autre formule que la sacro-sainte "réalisation clipesque" qui lui a été attribuée pendant tant d'années. Mais pour le réalisateur, le pire clivage reste à venir - un comble quand on a déjà adapté Watchmen, mais soit. Deux ans plus tard, le bon Zack revient en effet avec sa vision de Superman dans Man of Steel, qui surhomme oblige, exacerbe encore un peu plus son style et ses signatures, jusqu'à un final apocalyptique qui fait encore parler de lui.
Malgré des boucliers levés un peu partout, les détracteurs ne sont pas aussi forts qu'une phalange de spartiates et Snyder établit ainsi son camp chez DC avec un nouveau film promettant de réunir deux icônes, Batman et Superman, pour la première fois sur le grand écran. Un projet d'envergure et pourtant pris de cours par l'ascension du comic book movie. On connaît depuis le film sous le titre de Batman v Superman : Dawn of Justice, une sorte de prologue imparfait à Justice League. Deux films qui ont réussi, d'une manière ou d'une autre, à changer Zack Snyder. Frappé par une terrible tragédie en début d'année, le réalisateur le plus clivant de sa génération a depuis confié l'effort de guerre à Joss Whedon, l'architecte à peine secret de la concurrence. En cette semaine de sortie de Justice League, le style de Zack Snyder n'est donc plus aussi reconnaissable qu'on ne le croit, mais c'est ce qui rend le personnage passionnant à étudier.
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