Précédemment dans notre Countdown To Infinity War :
• Iron Man : point de départ ou point de non retour ?
• The Incredible Hulk : un mal pour un bien ?
• Iron Man 2 : première défaite du modèle ?
• Thor : le marteau et l'enclume ?
• Captain America - First Avenger : méta pour les bonnes raisons
Avec à l'heure actuelle dix-huit films à son actifs, l'univers Marvel Studios représente un colosse né il y a à peine dix ans. Chaque semaine jusqu'à la sortie d'Avengers : Infinity War sur grand écran, nous revenons sur l'un des films de la franchise. Et aujourd'hui se termine notre tour de la Phase 1 avec la locomotive Avengers !
Alors que Marvel Studios atteindra la fin d’une première ère avec la sortie d’Avengers Infinity War, assemblant l’ensemble de ses héros cinématographiques dans un diptyque épique, une première fin avait vu le jour il y a déjà (et seulement) six ans, lors de la sortie d’Avengers par Joss Whedon.
Et si de nombreux spectateurs voient aujourd'hui Joss Whedon comme un réalisateur moyen, qui n’aura pour mérite que d’avoir été le premier à réunir autant de super-héros à l’écran pour combattre un ennemi commun, avant de fournir un second opus fade (remember :4,5/5) et de s’enfuir à la concurrence, c’est bien vite mettre de côté les apports du papa de Buffy à l’univers Marvel sur grand écran.
Jadis prétendant au poste de réalisateur des X-Men, alors série phare de Marvel, c’est finalement une autre équipe de la Maison des Idées, et un autre studio de production, qui verront les faveurs de celui considéré à l’époque comme un éminent membre du clergé des « geeks ». Longtemps mis en arrière-plan des publications Marvel, au profit des X-Men, les Vengeurs avaient marqué le renouveau de l’éditeur au début des années 2000, avec le lancement des Ultimates de Mark Millar, et des New Avengers de Brian M. Bendis (suivant un début de run désassemblant carrément l’équipe historique). Alors que les droits de ces personnages aussi avaient été mis de côté, faute d’acquéreurs intéressés, il était naturel qu’ils deviennent également le renouveau des super-héros via un autre medium : le cinéma. Le tout en s’inspirant allègrement des travaux de Millar.
C’est ainsi que Marvel Studios fit d’Iron Man et consort les nouvelles stars de la pop culture, et pour leurs interprètes qui ne l’étaient pas déjà, des stars du cinéma. Et si aujourd'hui Avengers ne ressemble qu’à une première étape logique vers la suite, l’avenir du studio était bien moins évident à l’époque. Tout le monde n’avait pas accroché à certains des héros. Captain America n’était pas un personnage très apprécié du grand public au-delà du lectorat de comics. Thor avait eu un succès critique mitigé, comme le secondIron Man. Et certains se demandaient encore (et se demandent parfois toujours)si le dernier Hulk en date faisait réellement partie du Marvel Cinematic Universe. Alors de là à certifier que le tout marcherait ensemble, il restait du chemin à parcourir.
C’est pourquoi le choix de Joss Whedon semblait évident. Un auteur qui avait fait un carton à l’écrit avec les X-Men. Un créateur reconnu pour ses dialogues et ses dynamiques de groupe. Et un vrai fan du matériel original. De quoi espérer rendre hommage aux Plus Grands Héros de la Terre, pour s’assembler face au terrible Loki, à l’instar de leur formation (dans une configuration certes différente) sur le papier, le terrible demi-frère de Thor qui après avoir été introduit l’année précédente, renforçait ici une vision globale et organique du chemin parcouru pour parvenir à Avengers.
Et cela marche. Ce qui fait que le film restera dans l’histoire malgré une réalisation décriée à raison, et l’avènement d’un schéma de film hyper millimétré, c’est que rarement nous n’avons ressenti un tel sentiment de réussite, en tant que fan hardcore ou occasionnel, devant l’accomplissement d’un plan de plusieurs années. La jubilation de se trouver face à un réel univers partagé, étincelle d’une future dérive hollywoodienne, avec lequel on a évolué en temps réel. L’émotion de voir les personnalités s’entrechoquer avant de s’unir naturellement face à la menace. De voir Captain America prendre le lead de l’équipe, envoyer un Hulk se déchainer sur l’ennemi, de voir Iron Man prendre la mesure du rôle de héros, de voir des dieux s’allier aux humains, les civils aux agents spéciaux, ou de voir le ciel se déchirer au-dessus de la Terre.
Mais au-delà de cet aspect de point culminant qu’endosse le film, il devient l’étendard d’une formule Marvel qui veut toujours regarder vers la suite. Et le vrai génie de Whedon dans l’histoire, ce n’est pas d’avoir réussi à faire fonctionner l’équipe ensemble, mais d’avoir décidé de regarder d’ores et déjà vers l’avenir. Ainsi, ses personnages ont tous un arc personnel, certes, plus ou moins développé, qui se réverbérera dans le futur de la franchise, des doutes de Captain America envers le S.H.I.E.L.D. et son gouvernement, à ceux de Tony Stark sur son identité en dehors de l’armure. Avengers pose les bases des films à venir, et ce bien au-delà de la simple Phase 2.
Car si la création des Vengeurs se fait pour contrer Loki et son armée, Joss Whedon a compris une chose : une menace plus grande doit se cacher derrière tout cela. Et fasciné par Thanos, qu’il considère comme le plus grand vilain Marvel, il décide d’en faire son alien de l’ombre. Celui dont l’histoire réussira plus tard à réunir tous les pans du MCU à travers la quête des Gemmes de l’Infini, et la future invasion de la Terre qui aime tant lui résister.
Près de six ans plus tard, Avengers restera dans l’esprit de certains comme le film de nombreux records, et de nombreuses premières fois. Le film qui a poussé un grand nombre de producteurs à craquer devant l’appel de la formule et des billets verts qu’elle peut rapporter, sans penser aux dérives artistiques qui auront pu suivre.
Mais pour moi et de nombreux fans, cet Avengers tend à rester dans l’esprit comme cette pierre angulaire du MCU, un film qu’on sait loin d’être parfait, frappé par un terrible ventre mou en début de second acte, frappé par les mêmes symptômes qu’on reproche aux films des Phases 2 et 3, mais auquel on pardonne ses écarts devant le souvenir de ce qu’on a pu ressentir en salles, et les promesses tenues ou non qu’il nous proposait à l’époque. N’allons pas lui reprocher les dérives purement humaines qui s’en sont suivies.
Une nouvelle fois, merci Joss Whedon.