A ceux qui regrettaient déjà la disparition d'Iron Fist et de Daredevil des écrans connectés à Netflix, Marvel Studios n'abandonne pas la partie la plus orientale de son catalogue. D'après la très sérieuse rédaction de Deadline, la société de production aurait embauché David Callaham, un scénariste américain d'origine asiatique, pour concocter la première ébauche d'un script Shang-Chi, l'un des rares héros chinois de son catalogue. Fameux "projet mystérieux" dont on avait parlé précédemment et qui se concrétise aujourd'hui.
A ceux qui ne connaîtraient pas Shang-Chi et son univers, il s'agit d'un jeune héros inventé dans les années 1970 à l'époque du boum des films de kung-fu aux Etats-Unis. C'est d'ailleurs en ne réussissant pas à sécuriser les droits de la fameuse série Kung-Fu que Marvel aura proposé ce personnage, fils du cultissime vilain pulp Fu Man-Chu, pour surfer sur la tendance des long-métrages consacrés à la baston en 1973.
A l'origine de Shang-Chi, on retrouve deux immenses noms de l'histoire des comics : Steve Engleheart, deuxième père de Doctor Strange et architecte d'immense runs pour la Maison des Idées pendant l'époque du Bronze Age, et Jim Starlin, alors simple artiste, et qui sera plus tard l'inventeur de Thanos.
Les récits consacrés à Shang-Chi oscillent entre des thématiques empruntées au film de sabre, au film de clans ninjas et à l'espionnage, avec une tendance urbaine sur certains volumes lorsqu'il rejoint les Heroes for Hire de Luke Cage et Iron Fist, deux autres héros inspirés par le cinéma underground de l'époque, blacksploitation pour l'un et baston urbaine pour l'autre. Relativement confidentiel sur le papier, Shang-Chi fait généralement partie des troisièmes couteaux de la Maison des Idées - il présente cependant l'avantage d'être le héros asiatique le plus connu de cet univers, à côté de vilains comme Fu-Manchu ou Le Mandarin.
La manoeuvre est donc des plus explicites : après le succès de Black Panther et à l'aube d'une génération de films que le président de Marvel Studios, Kevin Feige, a présenté comme plus ouverte aux questions de diversité, de proposer le premier film de super-héros asiatique du répertoire. Un geste considérable, qui fait suite à des initiatives isolées - le succès de Crazy Rich Asians, ou la durée de vie de la série Fresh Off the Boat avec Randall Park, première sitcom à proposer des héros asiatiques au coeur des banlieues blanches des Etats-Unis.
Marvel Studios continue donc de défricher des terrains peu ou prou vierges - puisque si l'initiative paraît louable, Disney n'oublie pas non plus le poids considérable du marché chinois dans la réussite des blockbusters modernes. D'aucuns pourraient d'ailleurs se poser des question sur l'ordre des priorités de la compagnie, la fanbase de Shang-Chi étant relativement plus restreinte que d'autres personnages réclamés par les fans depuis des années.
L'adaptation a cependant le mérite de répondre à une critique formulée par de nombreux fans à différents extrêmes de l'échiquier sociétal : ne pas "transformer" un personnage pré-existant pour lui prêter une origine asiatique, mais aller directement chercher les héros de la maison qui font partie de cette catégorie, et ce depuis plus de quarante ans.
David Callaham a en outre déjà travaillé avec le studio, avec certaines réécritures d'Ant-Man. On avait également entendu parler de lui récemment après que Warner lui ait confié l'écriture de Wonder Woman 1984. Il aura aussi participé à des projets comme Godzilla ou Expendables, et fait partie de ces script doctors prolifiques que les studios s'arrachent, Sony d'un côté pour le nouveau Zombieland et Universal pour le film Wolf-Man avorté de feu le Dark Universe. Il est aussi le créateur de la série Jean-Clauve Van Johnson avec Jean-Claude Van Damme (donc, on l'aime bien), un micro-argument pour un film qui devrait résolument parler tatanes et autres prises du tigre tournoyant.
Deadline précise que Marvel Studios recherche actuellement un réalisateur asiatique, bien décidé à réitérer le vent d'authenticité apporté par Ryan Coogler sur Black Panther. Peu de chances que James Wan soit de la partie, le studio ayant plutôt l'habitude d'aller chercher ses faiseurs de demain du côté de l'indé'.