Sans grande surprise, Disney, FX et Hulu mettent (déjà) un terme à l'adaptation de Y : The Last Man. Une conclusion particulièrement rude, au terme d'un très long feuilleton. Brian K. Vaughan, auteur de la bande-dessinée originale éditée chez Vertigo, et Eliza Clark, responsable de cette première saison, se sont exprimés sur les réseaux sociaux pour commenter l'annonce de cette annulation prématurée. Le scénariste estime que la série serait encore en mesure de trouver un repreneur potentiel. A voir.
Why The Last (Last) Man
Si
Y : The Last Man vient tenir compagnie à la série
Jupiter's Legacy au rang des adaptations de comics tuées dans l'oeuf après une première salve d'épisodes, les deux projets ont en fait beaucoup de points communs. Au départ, la série basée sur l'oeuvre de
Vaughan et de l'artiste
Pia Guerra avait été confiée à Michael Green, producteur sur plusieurs fronts pour de grands chantiers d'Hollywood. Ce-dernier délèguera la fabrication concrète d'une première version de
Y : The Last Man à la scénariste Aida Mashaka Croal, pour assembler un premier pilote peuplé d'interprètes talentueux.
Barry Keoghan,
Amber Tamblyn,
Diane Lane,
Imogen Poots et
Timothy Hutton signaient
pour les différents rôles à pourvoir sur ce premier épisode, qui sera tourné en entier pendant l'été 2018. Problème, ce-dernier ne sera pas du goût du diffuseur.
FX décidera de limoger Aida Mashaka Croal, qui évoquera, amère, la piste d'un projet sacrifié sur l'autel de ses revendications (sans être beaucoup plus explicite quant aux détails, malheureusement).
Y : The Last Man entrera ensuite dans une longue période de submersion, avec une nouvelle équipe mise aux commandes du projet, et un tournage
encore et encore remis à plus tard.
Ben Schnetzer se chargera de reprendre le rôle de
Yorick Brown après le départ de Keoghan, occupé sur d'autres tournages.
D'autres vedettes devront passer la main, incapables de s'aligner sur le nouvel agenda de production. Il fallut alors trouver de nouvelles têtes, avec de nouveaux contrats, et donc, de nouvelles sommes à dépenser. En définitive, le pilote sera intégralement repensé, retourné, avec des frais supplémentaires -
l'usage d'un singe en images de synthèses, et les coûts d'une captation
en pleine pandémie de COVID-19, avec la facture sanitaire et les délais d'usage. Compte tenu de la popularité de certains membres de la première mouture du casting, on imagine que l'enveloppe globale, pour seulement deux pilotes, devait commencer à s'élever à une somme déjà assez importante.
Il était assez facile (ou même prévisible) de voir ce qui allait arriver à la série : déjà trop engagée pour être proprement annulée avant sa diffusion, mais aussi trop chère pour être sauvée si le succès n'était pas immédiatement au rendez-vous,
Y : The Last Man fut lâchée dans la mêlée de la rentrée avec une campagne de promo' particulièrement restreinte. Basculée sur
Hulu, l'adaptation des comics de
Brian K. Vaughan ne commença à faire parler d'elle
que quelques semaines avant son premier épisode, en occultant une partie des thèmes de la bande-dessinée pour se concentrer sur l'angle pandémique (du moins, sur le pur plan promotionnel).
Au total, il aura donc fallu six ans à Michael Green, Aida Mashaka Croal, Eliza Clark et leurs équipes respectives pour finir par sortir de cet étonnant tunnel - sur la base d'une BD généralement présentée comme un projet d'adaptation facile, presque clés en mains. Pour l'anecdote, Y : The Last Man circulait déjà dans les couloirs d'Hollywood en 2007, à l'époque entre les pognes du gourou de DC Comics chez Warner Bros., David S. Goyer. Il fallut attendre trois ans avant d'entendre parler d'un premier projet de série, et plus de dix ans pour poser les yeux sur cette tentative, en définitive, morte avant même d'avoir atteint les côtes de la plateforme Hulu. Les créations de ce genre, piochées dans le marché des univers indépendants, ont hélas rarement la possibilité de rebondir après un premier échec - il n'est donc pas impossible que Y : The Last Man ne soit plus jamais un projet à tenter aux yeux d'Hollywood, sauf cas exceptionnel.
Reste encore à savoir si le carnet d'adresse de Vaughan s'est suffisamment rempli ces dernières années pour motiver un repreneur potentiel. Pour celles et ceux qui souhaiteraient connaître la suite de l'histoire, celle-ci est disponible en intégralité aux éditions Urban Comics.